Bizarre ! Malheureux ! Dommage ! Ceux qui ont le plus fait, qui ont le mieux fait pour la presse guinéenne sont ignorés, voire méprisés. Ceux qui ont véritablement nui à la presse guinéenne sont encensés. Ceux qui ont payé cher pour la liberté de la presse en Guinée, les artisans et les parangons de l’indépendance des salles de rédaction sont méconnus. Ceux qui ont interdit cette indépendance et combattu cette liberté passent aujourd’hui pour les héros de la liberté de la presse et de l’indépendance des journalistes. Ceux qui ont introduit la corruption et toutes les autres ignominies dans le milieu des médias passent pour les meilleurs des hommes et se font célébrer comme tels. Les archétypes de la morale professionnelle et de la confraternité sont confinés pour ne pas dire consignés dans l’ombre.
Mon âge avancé me contraint-il au silence ? Un silence coupable ? Certaines fois, je me sens en devoir d’honorer les services rendus par mes camarades, de lustrer surtout la mémoire de ceux qui ne sont plus de ce monde. Pour payer tribut aux uns et aux autres. D’autres fois, je me retiens de parler de ce qui s’est passé, de comment cela s’est passé, de dire qui a fait quoi. Je me retiens pour ne gêner personne, pour ne déranger personne, pour laisser les tricheurs profiter de la chance que leur donnent ceux qui ne connaissent pas l’histoire véritable de la presse guinéenne. Le confort du silence n’est-il pas une hypocrisie ? Le vacarme du déballage n’est-il pas une infamie ? Je ne sais toujours pas. J’en reste à ma casuistique.
Ansoumane Bangoura