Abebe Aemro Selassie, directeur du département Afrique du FMI, Luc Eyraud, conseiller et chef de mission au département Afrique du FMI et Catherine Pattillo, directrice adjointe du département Afrique du FMI suggèrent des pistes pour attirer des investissements privés.

Les économies paralysées par la Covid-19, l’endettement public élevé et l’incertitude de l’aide internationale limitent les possibilités d’investissement public. Pour une reprise solide des activités économiques en Afrique, le secteur privé devra contribuer, comme l’ont souhaité les chefs d’État africains lors du Sommet sur le financement des économies africaines tenu à Paris. Routes, électricité, santé et éducation, constituent selon ces experts, les domaines dans lesquels le secteur privé pourrait intervenir. Les experts ont d’abord identifié les entraves au financement privé en Afrique. Par rapport aux autres continents, le secteur privé participe peu au financement et à la fourniture d’infrastructures en Afrique, disent-ils. «Les entités publiques, telles que les administrations nationales et les entreprises publiques exécutent 95% des projets infrastructurels. Le continent n’attire que 2% des flux mondiaux d’investissements directs étrangers. Et ces investissements se concentrent sur les ressources naturelles et les industries extractives, pas la santé, les routes ou l’eau».

D’après leurs analyses, les investisseurs internationaux regardent trois risques : Le risque inhérent au projet. «Bien que l’Afrique présente de très nombreuses possibilités de faire des affaires, le nombre de projets qui sont réellement prêts pour l’investissement reste faible. Il s’agit de projets qui sont à un stade de conception suffisamment avancé pour intéresser les investisseurs qui ne souhaitent pas investir dans des projets en cours d’élaboration ou sur des marchés méconnus».

Le risque monétaire. «Imaginons qu’un projet dégage un rendement annuel de 10%, mais que la monnaie se déprécie de 5% sur la même période, éliminant la moitié des bénéfices pour les investisseurs étrangers : rien d’étonnant à ce qu’ils se méfient particulièrement du risque monétaire». Des politiques macroéconomiques prudentes, une gestion saine des réserves de change, peuvent fortement réduire l’instabilité d’une monnaie, indiquent-ils.

Le risque de sortie. Selon toujours les mêmes experts, aucun investisseur ne va risquer d’investir s’il n’a pas la garantie qu’il pourra sortir en vendant ses participations et en recouvrant ses gains. «L’étroitesse et le sous-développement des marchés financiers peuvent empêcher les investisseurs de se retirer en émettant des parts. Le contrôle des mouvements de capitaux peut ralentir la sortie ou en accroître le coût. Et dans les pays où le cadre juridique est fragile, les investisseurs risquent de s’enliser dans des procédures judiciaires pour faire valoir leurs droits».

Pour encourager l’investissement privé, ils recommandent des incitations comme des subventions et des garanties. Même si cela peut être coûteux et risqué sur le plan budgétaire, de nombreux projets ne peuvent se concrétiser sans elles. Il faudra y la transparence et des incitations bien calibrées pour éviter d’indemniser le secteur privé de manière excessive.

Oumar Tély Diallo