Chers lecteurs, cette page consacrée à un catholique par un musulman pourrait paraître insolite. Cependant, c’est le fruit d’une éducation «cosmopolite» d’un peulh métis, d’un enseignant, d’un politique à l’occidental. Que l’on pardonne cette introduction, elle est la confession d’une personne âgée, outrée par ce qu’il a vu dans la Guinée de ces dernières années.

Quand, pour la première fois, en 1985, j’ai demandé à rencontrer, monseigneur Robert Sarah, il m’a facilement reçu. Il m’a écouté et confié ses préoccupations pour la Guinée diverse, aimante et juste. Quelle ne fut pas ma fierté, d’être reçu par une si grande personnalité. Alors comme un miracle, miracle divin, j’ai revu le passé.

J’ai pleuré spontanément et j’ai revu ma mère, Mariama Cissé. Cette femme habitant à Sandervalia, Molasakhoya, concession non loin de la morgue, me disant : «Hé Ibrahima, tu ne dors pas aujourd’hui avec Foly Victor.» Mon copain Foly Victor habitait Boulbinet, à la 3ème Avenue, non loin de la primature actuelle.

Déjà par cet acte, aujourd’hui, j’ai compris que cette mère, fille d’un marabout du Woulada, m’inculquait l’universalité humaine». En effet,  Foly Victor m’invitait souvent à l’accompagner à la Cathédrale de Conakry. Là je regardais, émerveillé, assis, la splendeur de l’intérieur de cette Cathédrale. Je ne voyais que du beau, de l’amour. Aussi ma mémoire  me ramenait à Katako,  ce célèbre village catholique Baga du Kakandé. Je revoyais mon oncle Mahamoudou Cissé, grand musulman, à la limite fanatique, causer tranquillement avec tonton Dona, ancien douanier à la retraite. Ces souvenirs sont sortis grâce aux paroles réconfortantes, humaines et aimables de monseigneur Sarah.

Je courais voir mon ami le Docteur Da Silva, qui avait caché sa profession pour se mettre à la disposition de Lansana Conté, pour sensibiliser les guinéens sur la nécessité de l’union, de l’amour. Il avait mis de côté sa belle profession de dentiste. Hélas il n’a pu atteindre son objectif.

Aujourd’hui il est dentiste à l’intérieur de la cathédrale Sainte Marie de Conakry, Kaloum.

Ce rappel, chers lecteurs, n’est nullement inutile, il est le résultat de la foi, de la culture, de courage d’un homme de Dieu, le Cardinal Robert Sarah. Enseignant, j’ai suivi cet homme. J’ai pensé qu’aujourd’hui tout guinéen, païen, musulman et chrétien doivent connaître et suivre cet envoyé de Dieu, le Tout Puissant qui nous l’envoya le vendredi 15 juin 1945 à Ourouss, Youkounkoun. Ses parents étaient pauvres, mais le Seigneur Dieu les dota d’observation et de réflexion.

Le jeune Sarah dormait sur la terre battue de l’unique pièce de la case familiale, ses parents ont accepté son évangélisation par des pères français. Au lendemain de l’indépendance il décide de rentrer dans les ordres et part en France au séminaire de Nancy. Le régime d’Ahmed Sékou Touré d’inspiration socialiste et marxiste s’en prend à la petite communauté chrétienne. Le jeune Robert Sarah remplace ceux qui ont disparu dans les purges, à des postes clés du clergé guinéen. La hiérarchie catholique de Rome, le remarque par sa foi, sa culture, son humanisme et le nomme en 1979, à 34 ans, évêque. Ainsi il devient le plus jeune évêque du monde. Le Vatican le repère et le fait venir à Rome. Jean-Paul II le nomme «Secrétaire de la congrégation pour l’évangélisation des peuples» un poste stratégique, à notre avis le plus important au sein de la Curie Romaine. Pour nos lecteurs non chrétiens, la «curie» c’est l’ensemble du «bureau» que constituent les diverses administrations du pape. En un mot c’est le gouvernement papal. En peu de temps, il s’est fait remarquer à Rome. Un cardinal Allemand Joseph Ratzinger, chargé de surveiller le respect des principes théologiques, s’approcha du cardinal Robert Sarah et en fit son principal collaborateur. Le cardinal Sarah est très vite remarqué par son intransigeance doctrinale, une volonté de revenir à des rites et usages postérieurs à la réforme de l’église catholique des années 60 sous le nom de Vatican II. Le 19 avril 2005, Ratzinger est élu pape, il prend le nom de Benoit XVI. En 2013, il renonce à sa fonction de pape. La presse privée italienne constate la corruption au sein du diocèse. Le pape  choisit des cardinaux de confiance ceux-ci lui rapportent  un rapport de 600 pages confirmant la réalité de son cabinet (sa curie). Certains cardinaux sont dans la magouille financière les plus scandaleuses. Le rapport de ces cardinaux de confiance montre que tous ceux-là qui sont propres et proches du Pape ont été écartés. Le Pape Benoit XVI, l’orthodoxe, loin de toute magouille est dans le plus grand embarras. Finalement il choisit la démission. Ainsi tous ces collaborateurs ne pourront plus faire partie du diocèse. Son ami et confident Sarah qu’il a décrété (nommé) Cardinal en 2010 est aussi triste, mais pas désemparé. Notre Cardinal Sarah, de Ourouss  pénétré de Dieu et du Christ continue le combat du catholicisme orthodoxe.   

Ainsi en 2015, il publie chez Fayard un ouvrage «Dieu ou rien» en 2016, encore chez l’éditeur Fayard, un autre ouvrage : «La force du silence» et en mars 2019 sort «Le soir approche et déjà le jour baisse» ce livre est écrit avec Nicolas Diat. Il nous fait prendre conscience de notre «lâcheté», face à la dérive civilisationnelle. Durant sa vie, il dénonce la fuite: «Sans Dieu l’homme n’est rien et ne peut rien». Pour approcher Dieu, il faut le silence, le silence apporte la réflexion, le savoir et le courage. Il constate «…La superficialité, l’égoïsme et l’esprit mondain que propage les sociétés médiatiques. Nous nous perdons dans des luttes d’influence, de conflits de personnes, dans un activisme narcissique et vain, nous nous gonflons de prétentions…»

Ces constats, ces dénonciations utiles, ces dérives de l’occident chrétien sont surtout valables pour nos dirigeants musulmans. Hélas ils tournent dos au Coran.

Lisez attentivement, avec intelligence les sourates: Baquara, Yunus, An Nahl.

Cardinal Sarah, les amoureux de Dieu et de ses paroles sont fiers du fils de  Ourouss. Que le Seigneur exauce vos vœux.

Diallo I