Un peu plus de trois semaines après la chute brutale du Prési Alpha Grimpeur, la junte au pouvoir commence à hâter le pas. Le nouvel homme fort du bled, le colonel Mamadi Doumbouya va prêter serment le 1er octobre, devant les membres de la Basse-Cour suprême. Une cérémonie à laquelle le Grimpeur…pourrait suivre de près, ne serait-ce qu’à distance ? Elle se tient au Palais Mohamed V ex-Palais des Nations à Kaloum où le Grimpeur serait détenu au 1er étage, selon des racontars. La prestation de serment d’un chef qui n’a pas bénéficié d’un suffrage universel ne passe pas. Elle est pourtant mentionnée dans la Charte nationale de la transition que le CNRD a proclamée le 27 septembre.

Cette Charte, pendant cette période d’exception, constitue le fondement des décisions que le Laye-M’a-dit Doum-bouillant va prendre. Du Premier ministre civil au Conseil national de la transition (CNT), en passant par le gouvernement qui va être mis en place, elle a quelque peu permis de lever le voile sur les grandes lignes de la transition. Bien d’observateurs l’ont apprécié tout comme des voix se lèvent pour la critiquer, tant sur la forme que sur le fond. Parmi eux, il y a le juriste Karamo Mady Camara : «En ce moment, nous avons besoin de critiques objectives pour éviter que les ambiguïtés, les faiblesses d’écriture et les vides ne nous plombent. Sur la forme, la Charte est aujourd’hui la Constitution, il aurait été beaucoup plus utile de connaitre les auteurs. Cela aurait renforcé son caractère légitime, parce qu’une constitution a toujours des rédacteurs… Dans ce cas de figure, nous ne connaissons pas d’où provient la Charte ? Qui sont les auteurs ? Est-ce la volonté d’un seul homme ? La suggestion aurait été que les rédacteurs de la Charte puissent être connus».

Le juriste a aussi noté quelques incohérences dans la Charte : «Dans le préambule, il y a eu un adossement aux dispositions contenues dans les différentes contributions et mémorandums apportés par les couches sociales. Malheureusement, nous n’en connaissons pas le contenu et cela ne peut pas lier le peuple. Il était beaucoup plus sage de révéler le contenu, pour que les populations puissent intégrer l’approche collective et être une partie intégrante de la Charte. Il faut donner un caractère un peu démocratique. Il y a également la qualité du signataire de la Charte. Pour avoir le tire de Président de la transition, il faudrait être investi et installé, et là ce n’est pas le cas. Il a anticipé sur la prérogative qui devait lui être conférée».

Sur le fond, Karamo Mady Camara descelle également des failles dans les missions de la Charte. Il pense que l’absence d’une durée de la transition tirerait de là son origine : «Il est dit dans le libellé que ‘’les missions de la transition sont entre autres’’, est-ce que cela n’est pas la justification de l’absence d’une durée de transition ? Parce que la durée de la transition dépend de la mission qui lui est assignée. L’autre problème, c’est qu’il n’y a aucune distinction entre les principes et les valeurs de la Charte. Elle a aussi un caractère inclusionniste, alors qu’elle prévoit qu’une catégorie de personnes ne pourrait bénéficier d’une quelconque désignation dans les institutions de la transition… On doit également savoir si le Président de la transition est une autorité ou un organe… »

Karamo Mady Camara se pose aussi des questions la volonté du CNRD de faire prêter un serment le colonel Mamadi Doumbouya : « La transition suppose qu’il y a eu rupture de la légalité constitutionnelle qu’un gouvernement légitime a été renversé par le moyen d’un procédé antidémocratique. Amener ce mécanisme à être légaliser par une transition serait de facto admettre que les coups d’Etat peuvent à tout moment intervenir et il faut faire avec. Cela peut entraîner des précédents fâcheux et encourager le renversement des régimes ».

Il admet cependant que la charte impose cette prestation de serment  au colonel Doumbouya. Ce qui est néanmoins prévu demain, vendredi 1er octobre.

Yacine Diallo