Le 18 décembre, le Centre International de Recherche pour le Développement, CIRD, a organisé une cérémonie d’hommage à Nadine Bari, écrivaine, humanitaire et veuve d’Abdoulaye Djibril Barry qui, comme beaucoup d’autres Guinéens, a disparu sous le régime de Sékou Touré en septembre 1972. Une présence remarquée d’éminents acteurs du livre, des collaborateurs, des membres de la famille de son défunt mari, et de nombreux admirateurs. Une cérémonie en plusieurs étapes : projection du film Hier, je t’espérais encore, présentation de l’auteure et son œuvre, témoignages et visites d’exposition.

Dans le film, on retrace l’itinéraire d’une veuve à la recherche de la tombe de son mari disparu en 1972 dans des circonstances non encore élucidées. On voit Nadine remonter les pistes, traverser des villes et villages, interroger des informateurs, parcourir de longs chemins à la quête de nouvelles d’un « être aimé ». Après plusieurs années de quête, on voit Nadine et ses quatre enfants se recueillir sur la tombe du mari et père, dans le village de Tokounou, préfecture de Kankan.

Nadine Bari est née Nadine Paulette Boissiéras, en juin 1940 à Dordogne (France). Elle fait l’école primaire aux Aubiers, dans les Deux Sèvres, le collège à Angers. Puis, elle poursuit ses études universitaires à Paris où elle suit à la fois des cours de Droits et de Langues. Déjà, depuis ses années scolaires à Angers, Nadine avait été qualifiée de « meneur » pour avoir dénoncé la qualité de la nourriture servie. «Vous avez très tôt estimé avoir des droits à faire valoir, surtout quand on vous les refusait sans raison», a rappelé Dr Safiatou Diallo, fondatrice et présidente du Conseil d’Administration du CIRD.

Pr Odile Goerg, historienne, depuis la France, a parlé de la rencontre de Nadine et son époux, Abdoulaye Djibril Barry dit «Noppi» (oreilles en pular), sobriquet tiré de la taille de ses «oreilles longues et décollées». Ce dernier, boursier de l’Etat guinéen comme beaucoup d’autres jeunes, était en tronc commun avec Nadine pendant les deux premières années d’université. Celle-ci, malgré un contexte marqué par la méfiance et le racisme, se plaisait à être en compagnie des étudiants africains. Nadine a réussi à convaincre ses parents et obtenu leur accord d’épouser celui qu’elle aime. Mais leur vie commune n’aura duré qu’une dizaine d’années, avant d’être écourtée par la disparition de son mari.

L’écriture est un moyen que Nadine a utilisé pour extérioriser le mal qu’elle vit, l’amour qu’elle a pour l’homme qui l’a conquise à jamais. Grain de Sable ; Noces d’absence ; La dictature, mode d’emploi ; Chroniques de Guinée ; Le cri de la mangouste, sont entre autres, ouvrages sur les 13 écrits par Nadine et dont les recettes sont destinées à financer les activités de l’ONG Guinée-solidarité, créée en 2006. La toute dernière signature de Nadine Bari est L’accusé, œuvre dans laquelle l’auteure imagine et romance le «procès» de Sékou Touré devant les juges du TPI (Tribunal pénal interstellaire).

Auparavant, à travers des témoignages émouvants, l’assistance a salué une personne qui a fait du courage, la patience et la persévérance, ses armes irréductibles pour vivre pleinement l’amour et le prouver, malgré l’absence de l’être aimé.

Th Hassane Diallo