En mars dernier, le Conseil national de la transition a expédié ses Conseillés un peu partout à travers le bled. Objectif ? « Recueillir l’avis » du populo sur quelques préoccupations du moment et permettre au CNRD de savoir sur quel pied danser. Chantiers de la transition, système et régime politique pour la Guinée, réconciliation nationale, relations entre l’administration et les collectivités locales, 17 équipes ont sillonné la Guinée pendant une dizaine de jours pour, dit-on, connaître l’avis des populations sur la conduite de la Transition. Leur rapport final a été rendu public le 11 mai, dans la Salle du 28 septembre du Palais du peuple de Cona-cris. Le doc est plein d’enseignements et…d’intrigues.

Les responsables du CNTêtu avaient annoncé cette mission comme une ultime occasion de rassembler les avis de la majorité des Guinéens sur comment le CNRD doit gérer cette période d’exception. Ce ne sont finalement que 25 000 sur près de 13 millions de Guinéens qui ont été consultés par les « honorables conseillés. » Et les résultats sont sans appel. Sur pratiquement toutes les thématiques mentionnées, les réponses vont dans le sens des attentes, du moins de la volonté du CNT. Bizarre ! Sur la réconciliation nationale par exemple, le rapport indique que 87% des consultés veulent aisément parler de cette problématique avec d’autres qui ne sont pas du même parti politique, de la même religion ou de la même ethnie.

Selon le CNT, 4 281 personnes ont donné leur point de vue sur la conduite de la Transition. 64% déclarent qu’elle est bien menée, 26% disent qu’elle se déroule plutôt bien, 4% estiment qu’elle est mal gérée, 4% n’ont pas donné de réponse.

Le rapport a également fait cas du système politique qui pourrait être mis en place, après la transition. Le bipartisme est recommandé par 77% des avis gens sondés. Ils estiment que le multipartisme a contribué à l’ethnocentrisme et à la désunion. La majorité des consultés optent pour un régime politique où les pouvoirs sont équilibrés. Un régime dans lequel le Président de la République ne décide pas de tout.

Quant à la réconciliation nationale, les consultés y adhèrent, mais veulent d’abord des préalables : dialogue, justice, pardon, sensibilisation, vérité, respect, paix et acceptation. Une batterie de préalables, pour justifier une transition de longue durée ? Allez savoir !

Au-delà de la réconciliation nationale, les consultés ont d’autres attentes qu’ils considèrent comme chantiers prioritaires de la Transition. Ce sont l’organisation d’élections libres, crédibles et acceptées de tous, la rédaction d’une Constitution adaptée aux réalités guinéennes, la lutte contre la corruption, les détournements des deniers publics, la récupération des biens de l’Etat. Pour y arriver, ils optent pour une durée de la Transition comprise entre trois et cinq ans.

Concernant les étapes de la transition, les sondés se seraient exprimés en faveur de l’organisation d’élections libres et transparentes, le recensement général de la population, l’assainissement du fichier électoral, la justice, la refondation de l’Etat et la construction d’édifices publics.

S’agissant des collectivités locales, 90% des consultés sollicitent davantage de ressources, mais aussi une autonomie financière. Les nouvelles autorités l’entendront de cette oreille ? A se demander si la préparation de ce rapport n’est pas pour justifier l’adoption de la résolution de chronogramme de 36 mois pour un retour à l’ordre constitutionnel ?

Yacine Diallo