Arrêtés le 13 juillet, le reporter américain Nicholas Niarchos a été libéré le 19 juillet, alors que son confrère congolais, avec lequel il travaillait, est toujours détenu par les services de renseignement congolais. Reporters sans frontières (RSF) dénonce cette détention complètement arbitraire et demande sa libération immédiate.
Deux poids, deux mesures. Et une procédure complètement arbitraire. Joseph Kazadi -responsable du journal Leader, collaborateur du magazine Mining News, et correspondant de Journaliste en danger (JED), l’organisation partenaire de RSF en République démocratique du Congo (RDC) – est toujours détenu par l’agence nationale de renseignement (ANR) à Kinshasa, plus d’une semaine après son arrestation le 13 juillet dernier à Lubumbashi (au sud-est de la RDC). Le journaliste congolais avait été arrêté avec son confrère américain Nicolas Niarchos, collaborateur des hebdomadaires The Nation et Newsweek. Or, ce dernier a été libéré dans la nuit du 18 au 19 juillet sans qu’aucune charge ne soit retenue contre lui.
«La détention de ce journaliste congolais est complètement arbitraire et vire même à l’acharnement après la libération de son confrère américain, estime le responsable du Desk Afrique de RSF Arnaud Froger. Nous demandons sa libération immédiate et appelons les autorités congolaises à mettre fin aux pratiques répressives de l’ANR qui consistent à détenir abusivement des journalistes, à saisir leur matériel et à effacer leur contenu pour les empêcher de travailler ou au prétexte fallacieux d’assurer leur sécurité ».
Au moment de leur arrestation, les deux journalistes enquêtaient sur les liens entre les mines artisanales et les acteurs qui bénéficient de ces ressources dont les Maï Maï Bakata Katanga, un groupe de miliciens du sud du pays.
Interdit de séjour en RDC
Selon les déclarations de Nicolas Niarchos et les informations obtenues par RSF, le journaliste américain a été accusé d’espionnage. L’ensemble de son matériel a été saisi et fouillé. Les photos et films de son enquête ont été en grande partie détruits et ses notes ont été consultées. L’ANR a également fait fuiter une photo de son passeport qui circule sur la messagerie Whatsapp. Plus grave encore, alors qu’aucune charge n’a été retenue contre lui, le journaliste a été contraint de signer un papier lui interdisant de se rendre de nouveau en RDC en échange de sa remise en liberté. Selon les informations de RSF, l’ANR a même demandé, en vain, que les diplomates américains venus plaider la cause de leur ressortissant s’engagent par écrit à ce qu’il ne revienne pas en RDC. Le reporter, qui était dûment accrédité comme a pu le vérifier RSF, avait pourtant largement pu faire état de sa qualité de journaliste compte tenu des nombreux articles qu’il avait déjà écrits sur différents sujets en RDC.
L’avocat constitué par RSF pour défendre le journaliste s’est rendu ce 21 avril au siège de l’ANR à Kinshasa mais n’a pas pu s’entretenir avec lui. Joseph Kazadi n’a jamais eu accès à un avocat depuis le début de sa détention.
Contactés, ni le responsable de la communication de l’ANR Patrick Kitenge, ni le ministre de la Communication et des Médias Patrick Muyaya n’ont donné suite aux sollicitations de RSF.
Depuis le début de l’année, 19 journalistes ont été arrêtés arbitrairement en RDC. Les reporters Patrick Lola et Christian Bofaya sont détenus depuis le 10 janvier dans la province de l’Équateur. Ils avaient été arrêtés à l’occasion d’une marche de protestation de députés provinciaux contre la gestion de la province par le gouverneur.
RSF réitère sa demande de mettre en place au plus vite un moratoire sur les arrestations de journalistes, comme les autorités s’y étaient engagées à l’issue des États généraux de la presse, le 29 janvier dernier.
Reporters Sans Frontières