A quelques exceptions près, la situation politique guinéenne en ce mois de septembre 2022 ressemble terriblement à celle de la même période en 2009. Il y a 13 ans exactement, le CNDD alternait le chaud et le froid. Comme le CNRD le fait en ce moment. En septembre 2009, il y avait une junte militaire au pouvoir qui entretenait un flou total sur ses intentions. Encore aujourd’hui ceux qui se sont emparés du pouvoir il y a un peu plus d’un an font l’objet des mêmes pressions que leurs camarades rattrapés par leur passé. Avec, comme hier, l’implication de la fameuse communauté internationale en vue de rendre à César ce qui appartient à César.
C’est au même moment que le CNRD, qui s’est engagé dès les premières heures de sa prise du pouvoir à faire de la justice la boussole qui oriente toutes ses décisions, concrétise une de ses promesses phares. Avec en toile de fond, l’ouverture ce mercredi 28 septembre 2022 du procès des tristement célèbres massacres du 28 septembre 2009 au stade éponyme.
Même si dans un pays où la confiance entre les acteurs est sérieusement et dangereusement entamée, certains disent attendre de voir avant de croire. Avec l’ouverture de ce procès, le nouveau pouvoir marque incontestablement des points. Aussi bien au niveau local qu’international. Tant les victimes et les leurs avaient perdu l’espoir de voir ce jour. Parce que pour des raisons qui lui étaient propres, l’ancien régime trainait les pas dans ce dossier.
Pendant une décennie, le régime de M. Alpha Condé a nargué les victimes et les partenaires de la Guinée. Chaque fois que les organisations de défense des droits de l’homme tiraient sur la sonnette d’alarme, le gouvernement prenait une initiative. Avec, entre autres, l’inculpation de certains présumés commanditaires ou exécutants. Histoire d’emballer ces organisations qui, toutes les fois que la Guinée a mis en branle la justice, se sont félicitées. Finalement, elles ont fini par comprendre que le régime de Conakry les roulait dans la farine. D’autant plus que certains présumés criminels occupaient d’importantes et stratégiques fonctions.
Fallait-il un officier de l’armée guinéenne à la tête du pays pour arrêter et juger ceux qui, il y a 13 ans, avaient droit de vie et de mort sur les Guinéens ? Beaucoup d’observateurs répondent par l’affirmative. Estimant qu’Alpha Condé voulait faire ce que Mamadi Doumbouya vient de faire, mais il était frileux. Craignant un mécontentement au sein de la grande muette qui conduirait à ce qui s’est finalement passé le 5 septembre 2021.
Dans tous les cas, ce procès entre dans les annales de l’histoire de la Guinée. Quelle que soit son issue, il pourrait marquer le début de la fin de l’impunité. Toute une leçon. Particulièrement pour ceux qui sont actuellement au pouvoir. Ces derniers doivent savoir que de la même manière que Moussa Dadis Camara et ses hommes sont passés de tout-puissants qu’ils étaient il y a 13 ans au vulnérables qu’ils sont aujourd’hui, Mamadi Doumbouya et les siens deviendront un jour des anciens dirigeants, tout aussi vulnérables.
D’où l’importance pour eux de réfléchir mille fois avant d’agir. A voir le trio Moussa Dadis Camara, Moussa Thiegboro Camara et Aboubacar Sidiki Diakité alias Toumba au sommet de leur gloire, personne ne pensait que les trois hommes se retrouveraient aujourd’hui devant le banc des accusés. Ironie de l’histoire.
Habib Yembering Diallo