Le dernier coup d’Etat intervenu le 30 septembre 2022 au Burkina Faso est le cinquième en Afrique de l’Ouest depuis 2020. C’est carrément comme aux années 70-80, durant lesquelles le continent noir enregistrait une dizaine de coups d’Etat par an. Particulièrement en Afrique de l’Ouest, une partie de l’Afrique centrale et orientale.

Pour expliquer la pause dans les coups d’Etat militaires, il faudra remonter au célèbre discours de la Baule, prononcé par le président de la République française, François Mitterrand, le 20 juin 1990, dans le cadre de la 16e conférence des chefs d’État d’Afrique et de France à laquelle étaient invités 37 pays africains et qui s’est déroulée dans la commune française de La Baule. Pour la première fois, le président français conditionna l’aide française à la démocratisation de l’Afrique. A l’époque si Paris s’enrhumait l’Afrique francophone éternuait. Suivront immédiatement les palpitantes conférences nationales dites souveraines.

Quelques pays, comme la Guinée et le Sénégal, feront toutefois exception. Dans le premier, le président Lansana Conté avait déjà pris les devants en annonçant quelques mois plus tôt l’instauration du multipartisme. Et dans le second le multipartisme était déjà consacré.

Dans la plupart des pays, ces conférences nationales furent transformées en un véritable procès contre le pouvoir en place et plus généralement contre les partis uniques. On revoit encore cette image insolite du président zaïrois d’alors inconsolable. Après 25 ans de règne sans partage, le maréchal Mobutu Sese Seko annonce le 24 avril 1990 la fin du parti unique au Zaïre. Pour le leader de la révolution zaïroise, le Zaïre était son objet personnel dont il était inconcevable de partager la gestion avec un autre.

Après le sommet de la Baule donc, l’Afrique francophone connaitra une pause dans les coups d’Etat militaires. Dans la foulée, l’Union Africaine avait « criminalisé » les coups d’Etat. Durant trois décennies, les chefs d’Etat du continent, autrefois confrontés à une anxiété permanente d’être renversés, pouvaient dormir tranquillement. Protégés qu’ils étaient par la démocratie. A l’exception toutefois de l’Afrique centrale où, dans les deux Congo, le pouvoir a changé de mains par un coup d’Etat. A Brazzaville, Denis Sassou N’Guessou est revenu au pouvoir en 1997 après avoir évincé le président Pascal Lissouba, démocratiquement élu. Et à Kinshasa Laurent Désiré Kabila a chassé le vieux léopard le 16 mai 1997 avant d’être assassiné le 16 janvier 2001 et remplacé par son fils.

Dans la partie ouest du continent noir, deux facteurs au moins, expliquent le retour des coups d’Etat militaires. Le premier est ce qu’il convient d’appeler les coups d’Etat constitutionnels. En l’occurrence le tripatouillage d’une constitution qui limite le nombre de mandats à deux pour rester au pouvoir à vie. Les militaires se sont dits, « si c’est cela la démocratie, les civils n’ont aucune leçon à donner.

Ce fut le cas au Niger avec le reversement de Mamadou Tanja le 18 février 2010. Ce fut aussi le cas en Guinée où, pour la première fois, l’armée a renversé un président en exercice en septembre 2021. Le deuxième facteur du retour des coups d’Etat est la déstabilisation de la Libye par les grandes puissances, dont la France qui, par ailleurs, est accusée de faire deux poids deux mesures avec les auteurs de coups d’Etat en Afrique. De nombreux observateurs estiment que la bénédiction de Paris pour la succession d’Idriss Deby par son fils a incité certains officiers à dire pourquoi pas moi.

Habib Yembering Diallo