Nous abordons cette semaine une phase importante de la transition avec l’appel à une manifestation pacifique des Forces Vives de Guinée. Par la force des choses, cette structure qu’on pensait à jamais dissoute à la faveur des élections présidentielles de 2010, s’est reconstituée subitement, cette fois, pour braver le CNRD. Une renaissance qui devrait donner à réfléchir, puisqu’elle intervient au moment où se déroule le procès sur les tragiques et douloureux événements du 28 septembre 2009. A ce propos, dans le contexte qui prévaut ces jours-ci, avec la détermination des autorités à faire respecter la loi, et l’engagement des Forces Vives à manifester le jeudi 9 mars, à quel scénario catastrophe pourrait -t-on assister ?

De ce qui précède, il n’est pas superflu de revisiter l’histoire récente du pays. Après 24 années au pouvoir, le général Lansana Conté décède à l’âge de 74 ans. La mort de Lansana Conté venait d’être officiellement annoncée depuis seulement six petites heures, un deuil national de 40 jours venait d’être décrété et les drapeaux mis en berne quand, aux premières lueurs du jour, un capitaine de l’armée guinéenne du nom de Moussa Dadis Camara, annonça dans une déclaration télévisée, la dissolution du gouvernement, de l’Assemblée nationale et des autres institutions républicaines, la suspension de la Constitution.

En dépit des bonnes intentions affichées, lentement mais sûrement, l’on assiste à une personnalisation à outrance du nouveau pouvoir militaire. Avec pour conséquence, un blocage à toute alternance démocratique. Le scénario d’une alternance démocratique permettant le retour à un régime civil et légitime ne peut survenir que si deux défis sont relevés : la volonté politique du chef du CNDD d’aller dans ce sens et l’indépendance ainsi que le fonctionnement régulier de la Commission électorale nationale indépendante (CENI).

En réalité, ces deux obstacles à une alternance démocratique ne peuvent être surmontés que par une union sacrée des Forces vives. Pour la première fois en Guinée, les Forces vives, qui sont composées des partis politiques, des dirigeants syndicaux et des organisations de la société civile, se concertent et prennent des positions communes pour la gestion de la transition. C’est ainsi que d’un commun accord, elles décident de l’organisation d’un grand meeting pacifique le 28 septembre 2009, ayant pour objectif de montrer leur capacité de mobilisation face à la junte d’une part, et de protester contre l’éventuelle candidature du capitaine Moussa Dadis Camara à la prochaine présidentielle d’autre part. Ce meeting eut bien lieu à la date prévue avec les conséquences qui en découlèrent.

Il revient ainsi à tous les acteurs de la transition de méditer sur les tragiques événements du 28 septembre 2009. Si dans leur écrasante majorité les Guinéens souhaitent une transition apaisée, qui déboucherait sur des élections transparentes et crédibles, cet impératif ne pourrait être satisfait qu’à condition de régler une série de préalables. Dans cette optique, il serait intéressant d’évaluer les efforts fournis par tous les acteurs de la transition, pour satisfaire l’attente des citoyens.

Thierno Saïdou Diakité