Gianni Infantino dirige le football mondial depuis la chute de Sepp Blatter en 2016. Jeudi 16 mars, il est réélu jusqu’en 2027. Une reconduction sans surprise ni contestation. Il a brigué le poste par acclamation lors du 73ème congrès de la FIFA, Fédération internationale de football, à Kigali au Rwanda. Rien d’étonnant, il a déjà été reconduit dans les mêmes conditions en 2019 par les délégués des 211 fédérations membres de la FIFA. Les statuts de l’organisation prévoient désormais trois mandats de quatre ans au maximum. Infantino considère son premier mandat de trois ans, incomplet. En décembre 2022, il déclare qu’il était « toujours dans son premier mandat ». C’est l’astuce parfaite pour trôner au sommet du football mondial jusqu’en 2031.  

Conforté par cette réélection, le président de la FIFA entend inaugurer une ère du football mondial. Il entend combattre les inégalités dans cette discipline sportive et compare son histoire à la manière dont le Rwanda s’est relevé après le génocide. En novembre 2022, à la Coupe du monde au Qatar, il déclarait « se sentir qatari, arabe, africain, homosexuel, handicapé, travailleur migrant ». Des propos qui ont marqué les esprits.

 A l’ouverture du 73ème congrès de la FIFA, il a encore frappé très fort en comparant son élection inespérée en 2016 avec la manière dont le Rwanda s’était reconstruit après le génocide de 1994. Pas loin de renoncer n’étant pas favori, l’ancien secrétaire général de la FIFA s’est alors souvenu de sa visite au Mémorial du génocide de Kigali. « Je me suis posé la question : pourquoi je devrais me décourager. La manière dont ce pays s’est relevé de cette tragédie devrait nous inspirer tous. J’ai donc poursuivi la campagne, et ai été élu président de la Fifa quelques mois plus tard ».

Une expansion de la Fifa et des compétitions

Le dernier mandat de Gianni Infantino a été marqué par une vaste réforme sur les transferts des joueurs, l’institution d’un congé de maternité pour les joueuses professionnelles ou encore les règles de procédure disciplinaire plus protectrices pour les victimes du racisme ou de violences sexuelles. Jeudi 16 mars, le juriste au crâne lisse a encore clamé vouloir « rendre le football véritablement mondial ». Cela commence par la réformes des compétitions majeures directement organisées par la FIFA.

La Coupe du monde à 48 équipes et 104 matchs dès 2026, le mondial des clubs qui passe de 4 à 32 équipes à partir de l’été 2025, sont les principaux chantiers de la FIFA déjà entérinés.

Des réformes majeures du point de vue du business avec des milliards d’euros en jeu, mais inquiétantes côté sportif. Elles pourraient ressusciter les fractures du football. Mercredi 15 mars, le Forum mondial des ligues (WLF), regroupant une quarantaine de championnats, a dénoncé des décisions « sans consultation », qui alourdissent « un calendrier déjà surchargé, qui ne tient pas compte de l’impact sur la compétitivité des ligues internes et la santé des joueurs ». Comme son homologue (European League) regroupant les championnats européens, le Forum mondial des ligues annonce des réponses « les plus appropriées », laissant planer une riposte judiciaire.

Une finance Solide

A son actif, le dirigeant de 52 ans peut se vanter d’un bilan financier solide, avec une hausse de 18 % des revenus et de 45 % des réserves sur le cycle 2019-2022. La Fifa a récemment indiqué avoir atteint un chiffre d’affaires record de 7 milliards d’euros entre 2019 et 2022. L’avenir semble encore plus radieux puisqu’elle vise plus de 10 milliards d’euros pour la période 2023-2026. Les réformes du Mondial 2026 et d’autres tournois constituent un mastodonte pour faire exploser les recettes de billetterie et séduire un peu plus de diffuseurs.

Sous l’ère Infantino, l’instance dirigeante du football mondial a considérablement augmenté ses subventions pour les confédérations et fédérations de football, soit la clé de son système redistributif comme de son système électoral. Le président se pose en rempart face à l’hégémonie sportive et économique du football grâce aux programmes de développement de la FIFA dopés par ses recettes croissantes. De quoi gonfler sérieusement son portefeuille de rémunération annuelle globale des Confédérations et Fédérations.

Abdoulaye Pellel Bah