Poursuivi par le parquet spécial pour détournement de deniers publics, enrichissement illicite et blanchiment de capitaux, Oyé-Oyé Guilavogui, ancien ministre des Télécoms, a comparu de nouveau devant la Chambre des jugements de la Cour de répression des infractions économiques et financières (Crief).

L’audience de ce 26 avril a été consacrée au témoignage des représentants de Huawei-Guinée, sur la gestion de 50 millions de dollars ricains de prêt chinois à la Guinée, pour la relance de la Société guinéenne des télécommunications (Sotelgui). D’entrée, la demande de mise en liberté d’Oyé-Oyé Guilavogui a été rejetée par le tribunal.

L’ancien ministre des Télécoms jure, la main sur le palpitant, ne rien savoir de la gestion du fonds, affirmant que l’argent a servi à l’achat, à l’équipement de la Sotelgui et au test des matériels. Selon lui, l’échec du projet est dû à une question de gouvernance. N’empêche, le ministère public de le charger d’avoir détourné les 50 millions de dollars.

La dirlote de Huawei-Guinée a déclaré que le contrat d’équipement de la Sotelgui a été signée entre celle-là et Huawei Technologies. Il est à préciser qu’elle a été entendue sous réserve de la régularisation de la procuration, permettant Huawei-Guinée de témoigner. N’étant pas la représentante légale de Huawei Technologies en Guinée, le tribunal a estimé que la dame n’est pas habilitée à représenter Huawei Technologies, signataire du contrat avec la Sotelgui.

Selon la directrice, Huawei-Guinée n’était qu’un sous-traitant de Huawei Technologies. Elle assure que la livraison et l’installation des matériels, conformément à l’accord, ont été effectuées. Ainsi, poursuit-elle, l’Etat guinéen via le ministère des Finances, a signé le décaissement de l’argent pour Huawei Technologies qui, à son tour, a payé Huawei-Guinée pour les travaux réalisés. Selon elle, toutes les transactions se sont déroulées entre Eximbank et Huawei Technologies, avec l’accord préalable de l’Etat guinéen.

La directrice de Huawei-Guinée déclare qu’un peu plus de 37 millions de dollars qui auraient été versés, que le gouvernement guinéen aurait déjà arrêté le projet, or Huawei-Guinée n’avait pas fini de remplir sa part du contrat, avoue-t-elle.

A l’audience du 19 avril, en statut de témoin, Mamadi Condé alias Thalès, responsable de l’Administration et de contrôle des grands projets (ACGP), avait déclaré que 12 millions des 50 millions n’avaient pas été décaissés. Le juge, Alassane Mabinty Camara, interroge la directrice de Huawei-Guinée sur ce reliquat de 12 millions de dollars dans les comptes d’Eximbank. «Je n’ai pas de détail par rapport à ce reliquat de 12 millions de dollars », déclare Wang Lé.

«La relance utopique »

Thierno Bah, un ancien travailleur de la Sotelgui a été entendu en tant que témoin.  Selon lui, les 50 millions de dollars ricains étaient destinés à l’extension et à la modernisation des réseaux dans le Grand-Conakry.  «C’est l’ex DG de la Sotelgui qui a négocié l’obtention du prêt. La société devait 10 millions à Huawei, donc c’est les 40 millions qui devaient servir à l’achat des matériels ».

Thierno Bah parle des milliards engloutis, notamment entre primes et salaires des travailleurs. «M. Guilavogui doit accepter de collaborer avec le tribunal. La relance était utopique, les dates de relance annoncées c’était des chansons. Guinée Telecom n’était qu’un alibi. Ça n’a pas de sens ».

Finalement, l’audience a été renvoyée au 3 mai, afin de permettre à la directrice de Huawei-Guinée de se munir des pièces et de procéder à la régularisation de la procuration.

Yaya Doumbouya