L’unité d’action judiciaire diligentée contre Jack Gbignamou Haba alias Jack Woumpack a abouti à son arrestation dans la soirée du vendredi 9 juin à Coyah. Il est reproché à l’art-triste d’avoir tenu des propos injurieux et stigmatisants envers la communauté peule.  

Il aura fallu moins de 24h à la justice, réputée lente, pour mettre le grappin sur Jack  Gbignamou  Haba alias Jack Woumpouck, poursuivi pour des écarts de langage envers la communauté peule. Dans une vidéo diffusée le 8 juin sur sa page Facebook, l’artiste reggae-man guinéen a tenu des propos ethnocentristes, jugés « déplacés ». L’art-triste, dans sa sortie au vitriol, « injurie toute une communauté, appelle publiquement à la division, à l’ethnocentrisme, à la haine ethnique », a dénoncé le Collectif contre la haine ethnique en Guinée créé au pied levé.

Ce dernier, représenté par Thierno Madjou Bah, Sally Bilaly Sow, Abdoulaye Oumou Sow et Thierno Diallo, a dès le lendemain 9 juin saisi le parquet général près la Cour d’appel de Cona-cris. Sa plainte, consultée par Le Lynx, contient les propos incriminés. Jack Woumpack y impute « aux Peuls » d’être à la base des morts lors des manifestations de rue sur l’axe Hamdallaye – Cimenterie. Des victimes qu’il qualifie « de sacrifice humain » consenti pour avoir le pouvoir politique, alors que la communauté ciblée « concentre celui économique et intellectuel. Quiconque a ces trois pouvoirs impose son diktat ».

Les plaignants invoquent l’article 29 de la loi L/2016/037/AN du 28 juillet 2016 relative à la cyber-sécurité et à la protection des données à caractère personnel qui dispose : « Quiconque émet une injure, une expression outrageante, tout terme de mépris ou toute invective qui ne renferme l’imputation d’aucun fait par le biais d’un système informatique sera puni d’un emprisonnement de six mois à un an et d’une amende de 40 millions à 120 millions de francs guinéens ».  Et lorsque les infractions ont été commises en raison de l’appartenance de la victime à une ethnie, race, religion…l’auteur encourt un emprisonnement de trois à huit ans et d’une amende de 80 millions à 250 millions de francs glissants, précise la même disposition.  

« Atteinte à l’unité nationale »

L’action du Collectif a été renforcée par des injonctions de poursuites judiciaires du Garde des Shows, ministre de la Justice et des droits de l’homme, faites au même parquet général d’engager des poursuites judiciaires contre Jack Woumpack. Alphonse Charles Wrong a ordonné de le poursuivre pour des faits présumés « de divulgation par le biais cybercriminel des propos constitutifs d’injures, d’expressions outrageantes, des termes de mépris ou invectives envers des personnes, en raison de leur appartenance à un groupe social donné ». Le Garde des Shows déplore « des propos d’une extrême gravité, contraires aux valeurs de l’unité nationale ». Qui seraient « constitutifs d’infraction à la loi pénale », à la lumière de l’article 37 du Code de procédure pénale. Et d’enjoindre « sans délai au Procureur général près la Cour d’appel de Conakry d’engager ou de faire engager des poursuites judiciaires ou de saisir la juridiction compétente de telles réquisitions contre le mis en cause ».

Doublement saisi donc, le Pro-crieur général près la Cour d’appel de Cona-cris, Yamoussa Conté, a, à son tour, instruit dare-dare le Pro-crieur de la République près le Tribunal de première instance de Coyah d’engager des poursuites contre le reggae man. Et ce « pour avoir proféré des termes sur les réseaux sociaux qui sont de nature à porter atteinte à l’unité nationale, à l’honneur et à la dignité d’une ethnie en la diffamant et proférant des propos injuriant ». Il n’a pas manqué de rappeler les dispositions de l’article 27 et suivants du code de procédure pénale qui dispose : « Le téléchargement, la diffusion et la mise à disposition de messages, de photos, d’écrits, de dessins ou de tout autre représentation de théories ou d’idées, de nature raciste ou xénophobe, par le biais d’un système informatique, se rend coupable de délit, et sera puni d’un emprisonnement de cinq (5) à dix (10) ans et d’une amande de 100.000.000 de francs guinéens ».

Yamoussa Conté, déférant aux injonctions de Alphonse Charles Wrong, a en outre instruit au parquet de Coyah de prendre les dispositions pour empêcher Jack Gbignamou Haba dit Jack Woumpack de quitter le territoire national. Aussitôt dit, aussitôt fait. Le mis en cause a été mis aux arrêts dans la soirée du 9 juin par la Brigade de recherches de Coyah. Placé en garde à vue, il sera déféré lundi ou mardi, a annoncé le parquet de Coyah.

Abdoulaye Pellel Bah