Dans quelle mesure le discours du Colonel Mamadi Doumbouya aux Nations Unies reflète-t-il ses opinions et ses priorités politiques ? Cette analyse se propose d’examiner le discours du Colonel en deux parties.
I Sur la forme
Structure du Discours : Le discours se compose de 32 paragraphes, 106 phrases, et 1994 mots. En moyenne, il y a 3,3 phrases par paragraphe, 18,8 mots par phrase et 5 caractères par mot.
Champs Lexicaux : Les champs lexicaux les plus saillants, après les titres, sont les termes « Afrique » et « peuple », avec une mention spéciale pour « putschiste ».
Langue et Style : Près de 99 % du discours est en français. Les verbes les plus fréquemment utilisés sont « être » (42 occurrences), « avoir » (14 occurrences), « devoir » et « prendre » (9 occurrences chacun). Le discours comporte 16 % de répétition de mots.
L’analyse lexicale de son discours montre que le Colonel Mamadi Doumbouya utilise une sémantique marquante. Il emploie 11,4 % de mots forts, qui incluent des termes d’emphase, d’exagération, ou de superlatif. De plus, 7,9 % des mots employés sont négatifs, renvoyant à une réalité négative ou transmettant un jugement défavorable. En revanche, 4,7 % du discours comporte des mots faibles, sémantiquement pauvres ou imprécis. Enfin, 12,6 % des mots sont positifs, traduisant fidèlement sa pensée.
Utilisation du Temps : Le Colonel Mamadi Doumbouya privilégie l’usage du présent (74,7 %) dans son discours, suivi du passé (24,7 %), tandis que le futur ne représente que 0,7 %. Ceci indique une prédominance de constats sur les perspectives dans son discours.
Répartition des Catégories grammaticales : Le discours est composé de 42,2 % de noms communs, 29,3 % de verbes, 13,8 % d’adjectifs, 12,2 % d’adverbes, et 2,5 % de noms propres.
II Sur le fond
L’analyse du discours politique du colonel Mamadi Doumbouya peut être divisée en plusieurs sections pour en dégager les principales caractéristiques.
1. Argumentation et rhétorique
- Exposition des problèmes : Le discours expose clairement les problèmes politiques en Afrique, notamment les coups d’État, les inégalités économiques, la corruption et l’influence étrangère.
- Analyse des causes : Le discours analyse les causes profondes de ces problèmes, soulignant les promesses non tenues, le tripatouillage des constitutions, et la mauvaise répartition des richesses.
- Appel à la réforme : Le discours plaide en faveur d’une réforme profonde du modèle de gouvernance en Afrique et exige une reconnaissance de l’identité africaine distincte.
- Appel à la confiance : Le discours appelle la communauté internationale à faire confiance à l’Afrique et à reconnaître sa maturité politique.
2. Figures de style
- Antithèse : L’utilisation de l’antithèse pour opposer les notions de démocratie et de réalités africaines, montrant ainsi un contraste entre les pertinentes occidentales et la situation vécue en Afrique.
- Anaphore : Le discours utilise fréquemment l’anaphore, en répétant la phrase « Monsieur le Président » pour attirer l’attention sur les différentes parties du discours.
- Énumération : Le discours utilise des énumérations pour lister des raisons et des causes des problèmes politiques en Afrique.
- Métaphore : L’utilisation de métaphores telles que « prendre notre destin en main » et « mettre fin à l’imposture » pour exprimer la volonté de changement et d’autodétermination.
3. Lexicométrie
- Répétition de mots clés : Le discours insiste sur des mots clés tels que « transition », « peuple souverain », « mutations », « inégalités », « bien-être », « modèle de gouvernance », « démocratie », « corruption », « patrimoine », et « coopération ». Cela renforce l’importance de ces concepts dans le discours politique.
- Termes liés à la critique : Le discours contient des termes forts de critique, tels que « pillage », « exploitation », « corruption » et « dictature », qui dénoncent les maux du système politique antérieur.
- Termes d’appel à l’action : Le discours inclut également les termes qui appellent à l’action, comme « prendre nos responsabilités », « prendre en compte nos droits », « coopération franche », et « partenariat Gagnant-Gagnant », suggérant ainsi une volonté de changement et de coopération.
4. Ton et style
Le discours adopte un ton affirmé et franc, exprimant clairement les opinions du président de la transition guinéenne. Le style est plutôt formel, conformément aux normes des discours politiques internationaux. C’est un style adopté par plusieurs présidents africains qui prônent une forme « d’indépendance » africaine vis-à-vis des modèles de développement occidentaux.
En résumé, le discours du colonel Mamadi Doumbouya présente une analyse critique des problèmes politiques en Afrique, en mettant l’accent sur les causes profondes, tout en appelant à une réforme profonde du modèle de gouvernance et à une coopération équitable avec la communauté internationale. Le discours utilise des figures de style et une lexicométrie marquante pour renforcer son message.
Dr Saïkou Oumar Baldé