« …Les présidents élus ont été destitués, renversés dans différents pays d’Afrique et ailleurs. Or, la démocratie est importante aujourd’hui plus que jamais. Nous sommes du côté de la CEDEAO, de l’Union Africaine et d’autres organisations internationales qui appuient le droit constitutionnel. Nous n’allons pas battre en retraite face à nos valeurs, nous défendrons la démocratie, notre meilleur outil pour relever le défi auquel nous faisons face de par le monde. » Joe Biden, le Président des États-Unis, semble catégorique devant la 78è assemblée générale de l’ONU.
Seulement voilà, aux yeux de maints observateurs de l’Afrique profonde, la fermeté du patron de l’Exécutif américain ne peut pas ne pas refléter la contradiction in nomine exprimée à travers la condamnation des putschs militaires vivement applaudis par les propres électeurs des présidents renversés. Peut-être sommes-nous victimes des subtilités des langues que nous avons librement, naturellement choisies comme langues officielles. Peut-être que tous les démocrates ne regardent pas dans la même direction, ou que, s’ils le font, ils ne voient pas la même…réalité démocratique.
Joe Biden a parfaitement raison quand il demande « au monde libre » d’éviter de ne point « battre en retraite face à nos valeurs. » Mais est-ce que celles-ci nous sont réellement communes ? Même si nous nous inspirons des deux « grandes démocraties, américaine et sénégalaise, » la question peut ne pas trouver sa réponse. Joe Biden a fait recours à Dame Thémis pour résoudre l’épineux problème de contestations électorales qu’avait soulevé le président sortant, Donald Trump, qu’il avait péniblement réussi à faire sortir par la force des urnes. La prochaine présidentielle américaine, prévue pour le premier mardi après le premier lundi de novembre 2024, peut bien opposer encore ces deux adversaires. La justice sera la seule force d’interposition, le seul arbitre de la partie.
En revanche, la démocratie sénégalaise semble moins patiente, plus tranchante, plus astucieuse. La rue aura suffisamment bouillonné pour obliger M. Sall à sortir du Maquis où l’avait enfoui la hantise du 3è mandat. A présent, le président sénégalaid, assisté de sa justice et de ses arsenaux, n’a d’autre préoccupation que d’éliminer à tout prix tout candidat à la candidature, apte à l’empêcher de nommer son successeur à la présidentielle de février 2024. Il n’attend pas les urnes, compte tenu des incertitudes. De ce côté-ci de notre village planétaire, le président sortant ne sort pas seul. Il sort avec tout opposant capable de faire ombrage au successeur choisi.
Enfin, Joe Biden a tout gâté quand il s’est mis « du côté de la CEDEAO, de l’Union Africaine… » Il retourne à l’impérialisme pur et dur. Le Niger en sait quelque chose. Les faucons d’Abidjan, de Dakar, de Lagos ou Lomé peuvent s’abstenir de témoigner. Aucun doute n’est permis.
Diallo Souleymane