« Le vrai bonheur, a dit un jour feu Félix Houphouët-Boigny, on ne l’apprécie que lorsqu’on l’a perdu. » Il s’empresse de conseiller : « Faisons en sorte à ne pas le perdre ! » L’ancien président guinéen, Alpha Condé, préfère certainement savourer son exil doré d’Istanbul avec les formules lénifiantes issues des cuisses du cercle restreint d’un autre milliardaire français, Vincent Bolloré, expert en communication. Aux yeux du futur ex-Président-Grimpeur, les formules-chocs de celui-ci passent certainement mieux que celles « du Vieux Renard de Yamoussokro ». Pourtant, l’ex-étudiant de la Sorbonne a pratiqué Houphouët et Bolloré à des moments certes différents, mais cruciaux de son destin.
L’ancien président ivoirien a usé du précieux flair d’Alpha pour faire de « Suc-Den », une réussite commerciale discrète et sans égale, aussi bien pour le chef de l’État ivoirien que pour l’ancien assistant à la Sorbonne.La flamme en valait peut-être la chandelle. Peut-on jamais s’assurer du sort d’un émigré de l’époque après quatre années infructueuses d’assistanat ? Un coquet appartement à la Place d’Italie, au cœur du 13è arrondissement de Paris, ne valait-il pas mieux qu’un hypothétique futur grade de maître-assistant ? « Un bon ‘’tiens!’’ vaut mieux que deux « tu l’auras. » dit-on ?
Pour Vincent Bolloré, les espèces n’auront sonné que pour faire trébucher l’opposition à l’occasion de la présidentielle de 2010. Un exploit. Une première. Une double victoire. Alpha bat tout le monde à plate couture pour sortir vainqueur d’un scrutin qu’il avait réellement perdu. Le rouleau compresseur de Bolloré le proclame « premier président démocratiquement élu de la Guinée indépendante. » Ça marche ! Peut-être lui-même finit par y croire.
En tout état de cause, sa gouvernance se révèle sans état d’âme. Que dis-je sans âme. Le 5 septembre 2021, il a le malheur de dégainer le dernier. Mamadi Doumbouya et ses hommes lui épargnent la vie. Mieux ou pire, ils l’envoient en exil, doré aux Émirats Arabes Unis; paradisiaque en Turquie. Rien n’y fait, il est mécontent. Et Pourtant…si on l’interrogeait sérieusement sur, au moins, la moitié des accusations qui ont jalonné sa très sombre carrière politique, il aurait mieux compris la sagesse du Président Houphouët, son premier bienfaiteur. Sûr qu’il aurait fait en sorte à ne jamais perdre le vrai bonheur dans lequel il nage à Istanbul. A grosses brassées.
Si pour une simple opération d’évasion de prisonniers à l’Hôtel 5 étoiles de Coronthie, la justice veut le poursuivre pour des faits présumés de trahison, d’association de malfaiteurs, de complicité, de détention illicite d’armes et munitions contre les intérêts fondamentaux de la nation guinéenne, que dira-t-on des rebellions, assassinats, des gaz lacrymogènes pour sécuriser des cortèges funèbres, des complots et manipulations qui ont émaillé les régimes de Fory Coco et d’El Dadis ? Il n’est pas raisonnable qu’un supposé État de droit interdise à un parti politique de défendre son leader, mais il est absolument malaisé d’entendre aujourd’hui le RPG parler de « volonté de museler le peuple de Guinée. » Qu’a fait Alpha de son pénible règne sinon que piétiner la constitution sur laquelle il a prêté serment ? Y-a-t-il pire parjure ?