Le gouvernement de la Transition vient de procéder à un toilettage de la politique de décentralisation qui croupissait depuis belle lurette dans les oubliettes. Sur l’ensemble du pays, on a créé quelques communes urbaines. L’opération a été particulièrement visible dans le Grand Conakry où les communes géantes de Ratoma et de Matoto, devenues depuis leur création, des enjeux des élections communales et législatives, en ont fait les frais. Elles ont été proprement disséquées en 6 communes urbaines de taille désormais modeste.
On a cherché à rapprocher l’administration des administrés, les gouvernants des gouvernés. On connait la chanson. Les résultats ne suivent pas souvent. Mais qui ignore que l’enfer est toujours pavé de bonnes intentions ! Les facteurs de réussite de ces nouvelles initiatives dans le champ de la décentralisation sont multiples. Les risques d’échec aussi. Il faut se souvenir que dans les années 80, à l’époque glorieuse du CMRN, la décentralisation naissante était porteuse d’un espoir certain sur le plan du développement humain durable. Elle avait dans sa gibecière le mouvement associatif incarné par les organisations non gouvernementales (ONG) dont l’éclosion et la diversité contribuent au mieux- être des populations vulnérables, notamment dans les zones rurales.
Malheureusement, la politique de décentralisation fut une symphonie inachevée. Elle n’alla guère au-delà des sous-préfectures et s’éteignit là, avec la création des CRD (Communautés Rurales de Développement). Les préfectures et les régions n’en profitèrent pas et n’en ont donc jamais profité. De belles philosophies de développement endogène furent ainsi tout bonnement enterrées. Les solidarités naturelles, socles de la solidité économique, administrative et politique de la CRD, n’ont pas été instrumentalisées à bon escient. La dévolution de responsabilités à la CRD en matière de maitrise d’ouvrage s’est heurtée à la faiblesse notoire des ressources financières et en capital humain de qualité. Pour palier ces insuffisances, la politique de décentralisation avait érigé les services déconcentrés préfectoraux en structures de tutelle des CRD tout en allouant des budgets d’investissement et de fonctionnement aux nouvelles collectivités. Tout cela n’a été qu’un vœu pieux. Et la quasi-totalité des CRD s’est retrouvée le bec dans l’eau. Rares sont celles qui ont pu tirer leur épingle du jeu. Dommage.
Le jeu en valait pourtant la chandelle. Toutes les études d’évaluation de la décentralisation conduites généralement par des consultants nationaux et internationaux indépendants ont abouti aux mêmes conclusions. Excellemment conçue et élaborée, la politique de décentralisation n’a pas atteint ses objectifs de développement parce que sa mise en œuvre a été carante. Elle n’a bénéficié ni de l’aide budgétaire suffisante de l’Etat, ni de son appui technique (mise à disposition de trésoriers publics.
La création des nouvelles collectivités émergées du toilettage a-t-elle profité des enseignements de la brève, mais enrichissante odyssée des CRD qui ont, au demeurant, perdu leurs initiales pour devenir des communes rurales ou urbaines ? Les communes urbaines et rurales, après toilettage, doivent absolument jouer leur fonction dans le développement socio-économique du pays, à travers la promotion du développement local.
Abraham K. Doré