Comme si on vivait dans les années 90, la guerre des gangs persiste en Guinée. Depuis quelques jours, un clan baptisé “250 microbes” sème des troubles dans le quartier Tobolon, secteur Mathossyah à Kagbelen dans le Grand-Conakry. Les violences ont déjà conduit à deux morts, plusieurs blessés et de nombreuses arrestations.

Le dernier incident remonte au mardi 14 mai, lorsqu’une kermesse a viré au cauchemar. Le clan “250 microbes”, qui revendique la paternité de l’établissement scolaire où se tenait la cérémonie, aurait exigé 500.000 francs guinéens aux organisateurs pour ne pas perturber le déroulé de la fête. Chassés de la soirée, les fauteurs de troubles armés de machettes, couteaux, pierres et autres armes blanches, ont décidé que le quartier paierait le prix fort de leur expulsion. Refusant de se laisser intimider, d’autres jeunes du quartier se sont constitués en groupe pour empêcher “250” de nuire. Le conflit s’est alors transformé en guerre de clans.

Depuis le week-end dernier, les habitants du quartier Tobolon vivent avec la peur au ventre à cause de ces groupes de hors-la-loi qui sèment la terreur. Les affrontements, qui ont débuté la nuit du samedi, se sont poursuivis jusqu’au petit matin. Les tensions ont été ravivées par la mort d’un jeune du nom de Tidiane Bah, après l’échec de la tentative de médiation des sages du quartier. Pendant trois jours, la zone a été assiégée, terrorisée par des gamins, et personne n’osait pointer son nez dehors. Il a fallu l’intervention des forces de sécurité pour rétablir l’ordre. Alayabouya Lansana Camara, chef de secteur, reconnaît que son quartier est pris en otage par des jeunes de 15 ans, du gang “250 microbes”. Que l’intervention des autorités a permis de mettre main sur une vingtaine de fauteurs de troubles, détenue au Commissariat de Dubréka.

“Battu à mort”

Lors de l’altercation, Amadou Touré, 18 ans, conducteur de moto-taxi, a été poignardé à mort. Un jeune du quartier raconte sous anonymat : « Depuis les dernières vacances ce groupe dénommé “250” crée la panique à Keitayah et Tobolon. Il effraye presque tout Kagbelen. Quand il apprend qu’il y a un événement quelque part, il vient gâcher la fête, blesser des gens et racketter la foule. Samedi dernier, ils sont venus à la kermesse du groupe scolaire Mariama Camara, pour extorquer 500.000 GNF, aux organisateurs, à défaut de créer la pagaille, comme d’habitude. Cette fois, on les a repoussés et, par mécontentement, ils ont décidé de récidiver. »

Mohamed Camara a eu le malheur de croiser le chemin des “microbes”. Il s’en est sorti de justesse et raconte sa mésaventure : « J’étais sorti me promener avec un ami. En rentrant, je suis tombé sur des membres du “250”. Ils se sont jetés sur moi, ont mis ma tête dans un sac et m’ont bastonné. Je me suis mis à crier et à appeler à l’aide, mais personne n’est venu, d’autres ont fermé leurs portes. J’ai été blessé par une lame. » Artiste en herbe, Mohamed Camara a été sauvé par l’un des agresseurs qui l’aurait reconnu. « Il a dit qu’il me voit prester dans les événements. J’ai été relâché… » Étant cagoulé, il n’a pu identifier aucun d’entre eux.

Les habitants de Tobolon et Keitayah prient pour que les autorités prennent des mesures strictes pour mettre fin à cette terreur et restaurer la paix dans leur quartier.

Abdoulaye Bah