Cinq jours après le retrait des agréments et des fréquences des Groupe de médias Hadafo (Espace FM, Sweet FM et Espace TV), Djoma (Djoma FM et Djoma TV) et FIM FM, le Syndicat des professionnels de la presse de Guinée conteste la décision qu’il qualifie d’illégale. Il annonce un « silence de Conakry à Yomou », à travers un appel à une éventuelle grève nationale. Celle-ci sera précédée par une réunion de l’ensemble des travailleurs du secteur des médias samedi prochain à la Maison de la Presse.

Le Secrétaire général du SPPG, Sékou Jamal Pendessa et son adjoint, Ibrahima Kalil Diallo, se sont montrés déterminés dès l’entame de leur communication ce lundi 27 mai.  « On ne sait pas quand est-ce qu’on va finir avec, mais rassurez-vous, qu’on a suffisamment de souffle pour tenir aussi longtemps que les ennemis de la presse sont là contre nous. »

Le mercredi 22 mai, certains cadres de l’Autorité de régulation des postes et télécommunication (l’ARPT) et un huissier ont débarqué dans les locaux de Djoma média, Fim FM, Espace Fm et pour les sommer de couper toute diffusion de leurs antennes, suite à une décision qui acte le retrait de leurs agréments signé par le ministre de l’Information et de la Communication ; Fana Soumah. Justement, c’est sur cette signature que le SPPG s’appuie, pour invoquer « l’illégalité de la décision ».

Une décision « illégale et non motivée »

Pour Sékou Jamal Pendessa, l’initiative d’attribuer et de retirer l’agrément d’une radio relève des compétences de la Haute Autorité de la Communication, non de l’Exécutif : « Quand il est question de retirer un agrément, le Ministère n’a aucune marge de manœuvre de prendre l’initiative. Il reste tranquille jusqu’à ce qu’il soit saisi par la HAC. Mais, nous avons tous vu le communiqué du ministère, ils ont cité beaucoup de considérants. Qui d’entre vous a vu un seul passage là où c’est écrit vu la décision numéro tel de la HAC ?  Ça n’existe pas. Donc, cela veut dire que le Ministère n’a pas été saisi par la HAC pour faire ce job, autrement dit sa décision est illégale », déclare le Secrétaire général du SPPG.

Le retrait des agréments signe la fin du brouillage des ondes des médias concernés depuis plus de 6 mois. Sur le communiqué signé par le Ministre de l’Information et de la Communication, le retrait des agréments des quatre radios a été motivé « pour non-respect du contenu des cahiers de charges », sans donner plus de détails. Ce n’est que le vendredi 24 mai, trois jours après la décision que le Gouvernement à travers son porte-parole s’est fendu d’un communiqué pour préciser que les quatre radios ont fait montre « de violation abusive de l’Article 6 du cahier de charges portant sur l’obligation de respect de la dignité de la personne humaine et les exigences de l’unité nationale et de l’ordre public. »

« Ce qui est totalement faux, ce sont des contrevérités », réagit Ibrahima Kalil Diallo, le secrétaire général adjoint du SPPG. « Vous prenez toutes les émissions depuis l’avènement du CNRD au pouvoir le 05 septembre 2021, c’est un défi que nous lançons, vous ne verrez jamais un journaliste, que cela soit les Grandes Gueules, Miradors ou On Refait le Monde (puisque que ce sont les émissions qui ont en réalité dérangé l’Etat), où des propos ont été tenus qui menacent la paix dans notre pays. »

Le syndicat dénonce en outre une décision qui n’est pas suffisamment motivée dans un communiqué qu’il appelle « laconique ». Le SPPG réclame au contraire des explications autour d’un acte posé par un des médias qui ne respectent pas les dispositions du Cahier des charges. Car, « en matière de décision administrative et judiciaire, on ne se limite pas à citer l’infraction, il faut relater les faits pour dire : voici ce qui a été fait et qui est contraire à la loi, en citant l’article », rajoute Sékou Jamal Pendessa.

Le SPPG va saisir la CNTG

Au cours de la réunion d’urgence du bureau national du SPPG tenue le 25 mai, Sékou Jamal Pendessa explique que le syndicat a prévu une batterie de mesures pour se faire entendre des autorités. Toutefois, pour des questions de stratégie, le contenu va être dévoilé progressivement. D’ores et déjà, le SPPG annonce, comme première action, la saisie de la Confédération nationale des travailleurs de Guinée, CNTG : « La lettre va partir dès aujourd’hui. Et tenez-vous bien, puisqu’ils veulent le silence dans le pays, c’est pourquoi ils ferment les médias, on va les aider. Ils sollicitent certainement une grève générale et illimitée. Il y aura du silence jusqu’à la Présidence, parce que la fonction publique va observer le mot d’ordre quand on va enclencher, s’ils n’entendent pas raison. Il y aura du silence de Conakry à Yomou », menace Sékou Jamal Pendessa.

L’éventuelle grève annoncée par le Secrétaire général touchera toute l’étendue du territoire nationale et concernera tous les secteurs. Le SPPG assure aussi que le terrain est suffisamment préparé pour mettre en œuvre son plan, « cela fait trois mois maintenant, puisqu’on savait qu’ils n’étaient pas prêts à lâcher, un travail de fond était en train d’être fait, en collaboration avec le mouvement syndical guinéen. »

La deuxième action annoncée est la tenue, le samedi 1er juin, d’une assemblée générale de l’ensemble des travailleurs du secteur des médias, à la Maison de la Presse, pour « dévoiler le reste du plan, parce qu’il y a des aspects » qui ne seront dévoilés qu’à la « dernière minute de leur application. »

Diarouga Aziz Balde