Le premier Ministre cher au gouvernement a présidé à Faranah, les cérémonies du 66è anniversaire de l’accession de la Guinée à l’indépendance. Le 2 octobre, Bah Oury et l’Histoire se sont fait plus d’un pied de nez devant le parterre de diplomates accrédités à Conakry, les grosses légumes du CNRD et le menu fretin local. Une occasion fort belle pour l’ex opposant de couronner une carrière toute de contradictions. « Le Président Doumbouya m’a dépêché à Faranah pour couper le ruban afin de remettre à la famille du feu Ahmed Sékou Touré, la villa Andrée qui a été rénovée. Pour moi, c’est un honneur et une fierté d’être celui qui représente l’État guinéen pour la restitution de la demeure rénovée de la villa Andrée. La refondation va dans le sens de la richesse de la réconciliation nationale, gage indispensable pour qu’il y ait un réel développement, une réelle stabilité et une réelle identité nationale partagée par tous les Guinéens. » La classe politique guinée-haine a dû ressentir l’onde de choc.
« Les opposants CNRD-compatibles » auraient adoré se voir dépêchés à Faranah pour exécuter sagement l’honorable mission du Général Doumbouya. En revanche, ceux parmi eux qui ont arpenté les mêmes couloirs de l’opposition d’alors, ont dû, le nez entre le pouce et l’index, admettre, à leur cœur défendant, que « l’homme est un inconnu-connu, un connu-inconnu, » du Président Sékou Touré.
Bah Oury doit savourer à juste titre les délices d’une mission à lui confiée par le Général Mamadi Doumbouya de réparer un sérieux cas d’injustice à Faranah. Seulement voilà ! Il n’est impossible que l’Histoire fasse des grimaces devant l’ancien militant des droits de l’Homme, pilier incontestable de l’opposition sous le régime politico-militaire du Général Lansana Conté et ce crypto opposant, Alpha Condé qui l’a poussé à l’exil. Bah Oury a exprimé sa satisfaction d’avoir été celui qui représente l’État guinéen pour la restitution. Bonjour, les pieds de nez !
Jusqu’à la veille de l’entrée de Bah Oury au Palais de la Colombe, le Guinéen lambda ne s’était pas fourvoyé dans ce qu’il croyait être les fondements de la pensée politique du futur PM : démocratie, justice, État de droit, liberté d’expression, droits de l’homme…à la logique implacable. C’était pour solder définitivement le passé grimaçant du pays d’Ahmed Sékou Touré. En 2024, la réparation d’une injustice envers la famille régnante d’alors n’aurait pas déclenché autant de réactions négatives de la part de nombre de victimes en attente de justice. C’est comme si Bah Oury avait planté l’arbre de la réconciliation à l’envers.
Pour sûr, le premier premier Ministre du CNRD, M. Béavogui, aurait cherché à se faire soigner dans un hôpital de Copenhague ou de Berlin si le Général Doumbouya lui demandait d’accomplir la mission de Faranah. Fin connaisseur de la Guinée et des Guinéens, Bah Oury ne se fait pas d’illusion sur la nature du chemin vers la réconciliation nationale, « gage indispensable pour qu’il y ait un réel développement, une réelle stabilité et une réelle identité nationale partagée par tous les Guinéens…On prend en compte toute notre histoire, quelles que soient les péripéties marquant ces moments historiques de notre chère patrie. » Le Guinéen aurait-il toujours son double visage des années 1970 largement dénoncé dans la déposition du camarade Moricandian Savané ? Ça alors !
Diallo Souleymane