Ces temps-ci, rien ne va plus entre les deux tourtereaux. La lune de miel aura fait long feu. Le Président de la première puissance mondiale et l’homme le plus riche du monde se regardent désormais en chiens de faïence depuis quelques mois déjà, tout en échangeant, par moments, des volées de bois vert, des piques. Leurs amabilités ont viré aux diatribes. Les deux alliés n’y vont plus avec le dos de la cuillère. Tenez ! « Sans mon argent et mes interventions, Trump n’aurait pas été élu Président. Il a un mauvais budget fédéral qui va exacerber le déficit budgétaire de son pays », décoche Elon Musk à l’endroit de Donald Trump. La repartie de Trump est tout aussi fulgurante : « Musk est un ingrat. Ses entreprises prospèrent grâce aux contrats de l’État fédéral. Et puis, il se drogue. »

Voilà donc les deux hommes les plus puissants du monde qui s’écharpent, se crêpent le chignon comme deux vieilles chipies. Les amoureux ne se sont-ils donc pas suffisamment évalués, jaugés avant de s’estimer, se rapprocher l’un de l’autre ? Rien n’est moins sûr. Pourquoi cette bourrasque aussi brusque qu’inattendue ?

Les enjeux et les orientations du budget fédéral 2026 sont à l’origine de la pomme de discorde entre les deux hommes qui se vouaient naguère une amitié indéfectible, à nulle autre pareille, lors de l’élection présidentielle américaine en 2024. Idylle qui avait valu à Musk d’être nommé à la tête du DOGE (Bureau de l’efficacité gouvernementale).

Origine (et conséquences) de la pomme de discorde

A ce poste, le citoyen américain d’origine sud-africaine a opéré des coupes sombres dans le budget fédéral à travers la suppression de millions d’emplois, voire tout bonnement d’entités fédérales (USAID, la VOA), ainsi que l’abandon d’appuis à des Agences du système des Nations Unies (UNICEF, OMS, etc.) Ces coupes sombres du DOGE porteuses de chômage massif sans réduction significative du déficit budgétaire ont suscité l’ire des Américains et l’émoi de la communauté internationale. L’arrogance de l’homme a fait le reste. L’effet boomerang est aux aguets. Il frappe les entreprises de Musk (SpaceX, Tesla). Ses voitures électriques enregistrent une importante mévente, notamment en Chine et en Europe. Les actions de ses sociétés en bourse plongent et perdent 15 % de leurs valeurs. Cette guéguerre va, sans aucun doute, aggraver la tendance à la dépréciation des sociétés d’Elon Musk.

Quant à la côte de popularité de Donald Trump, elle ne peut pas ne pas en souffrir. Déjà le Président américain est en conflit avec la loi à propos du nombre de ses décisions que des juges fédéraux ou d’Etat jugent inconstitutionnelles et suspendent. Aussi, l’aggravation du chômage par le DOGE n’est pas de nature à relever une quelconque côte de popularité.

Force est d’admettre que la brouille précoce entre les deux puissants amis écornera sérieusement leurs relations. Cependant, leur caractère lunatique peut réduire la durabilité des conséquences de leurs esclandres. Il faut souhaiter que toute cette agitation ne soit qu’une tempête dans un verre d’eau. Pour le bonheur de tous.

Abraham Kayoko D