Le dimanche 22 juin, un sommet des Chefs d’Etat de la CEDEAO s’est réuni à Abuja, au Nigeria. Parmi les différents points essentiels inscrits à l’ordre du jour, deux ont retenu l’attention : élection d’un nouveau Président (le mandat de celui en exercice arrivant à terme) et procédures relatives au départ des pays de l’AES (Alliance des États du Sahel).

A propos de l’élection du nouveau président, c’est le Chef d’Etat de la Sierra Leone, Julius Maada Bio qui été élu par ses pairs, pour succéder au président du Nigéria, Ahmed Bola Tinubu dont le bilan est considéré comme mitigé. Le nouveau président doit résoudre le lourd contentieux CEDEAO-AES et s’atteler à donner un nouveau souffle à l’organisation.

En ce qui concerne les conditions du divorce entre la CEDEAO et les Etats membres de l’AES, il faut noter que ces derniers, depuis la manifestation de leur intention de claquer la porte de l’Organisation, n’ont cessé de répéter que leur décision est irréversible. Ils ont constamment opposé un niet à la Brejnev. Les multiples missions de bons offices à l’interne ne sont pas parvenues à convaincre le Général Abdourahmane Tiani du Niger, le Général Assimi Goïta du Mali et le Capitaine Ibrahim Traoré du Burkina Faso de revenir sur leur décision. Concomitamment à ces démarches, des efforts extérieurs de médiation ont été entrepris. En vain. Les trois États démissionnaires ont continué plutôt à renforcer l’Alliance des Etats du Sahel, entité politique, sociale et économique qu’ils ont créée, après leur départ de la CDEAO. Face aux initiatives infructueuses de réconciliation, les deux organisations sont convenues d’acter leur séparation définitive, le 29 janvier 2025.

L’avenir des relations entre la CEDEAO et l’AES est devenu une pomme de discorde au sein de l’organisation économique de l’Afrique de l’Ouest. L’organisation est dorénavant divisée entre ceux qui sont favorables à une coopération conviviale pragmatique avec l’AES et ceux qui sont hostiles à cette nouvelle confédération dont ils considèrent les membres fondateurs comme des frondeurs.

 Il faut dire que l’entêtement et l’obstination des responsables de l’AES et la justification de leur départ en évoquant notamment la condamnation des coups d’État, peuvent surprendre et agacer. Car non seulement leur acte traduit leur allergie à la pratique de la bonne gouvernance, mais elle est en contradiction évidente avec leur profession de foi par rapport au panafricanisme impulsée par des forces centripètes. La CEDEAO n’était-elle déjà pas, avec ses 15 Etats, résolument tournée vers la construction d’un panafricanisme réaliste et concret ? De surcroit, elle peut se prévaloir d’incontestables acquis au bénéfice de ses populations (passeport commun, libre circulation des personnes et des biens dans l’espace communautaire, création de la ZMAO en vue d’une zone monétaire à l’échelle régionale par la disparition de la zone CFA). Abandonner une-t-elle organisation communautaire pour échapper à des sanctions indispensables à la bonne gouvernance d’une institution ne revient-il pas à renier le panafricanisme, pour répondre à un objectif inavoué ?

En tout état de cause, l’AES a du chemin à faire, avant de parvenir au niveau d’organisation de la CEDEAO. D’ores et déjà, les Etats de l’AES voudraient continuer de bénéficier des avantages communautaires notamment la libre circulation des personnes et des biens. Ce qui, bien attendu, ne peut se faire que dans un cadre de négociations pouvant être préjudiciables aux populations maliennes nigériennes et burkinabè. Face à la CEDEAO, l’AES n’est pas dans une posture de force. Loin s’en faut.

Abraham Kayoko Doré