Le vendredi, 1er juin, Me Cheick Sacko, le ministre de la justice, garde des seaux a procédé à la mise en place du comité de pilotage de l’organisation du procès sur le massacre du 28 septembre 2009. Ce comité composé de représentants de la société civile, des forces de sécurité, des magistrats de l’administration, des Nations-Unis, de l’Union Européenne et des Etats-Unis d’Amérique, est chargé d’organiser matériellement de ce procès qui se fait attendre depuis neuf ans.

Après la clôture de l’instruction par les trois magistrats en décembre 2017, Me Cheick Sako devait prendre un arrêté pour créer ce comité de pilotage. Tel n’a pas été le cas. Il a fallu que le 9 avril 2018 arrive  pour que l’acte se concrétise pour assister la composition du comité de pilotage ce 1er juin. Un exercice qui n’a pas été facile indique le garde des sceaux. « L’arrêté de création du Comité de pilotage n’a pas été facile à prendre parce que tout est difficile dans notre pays. Logiquement, je devais prendre cet arrêté le 27 décembre 2017 à la clôture de l’instruction, mais ça n’a pas été facile. L’arrêté a été pris le 9 avril 2018 c’est-à-dire 4 mois après. Ce qui n’est pas normal. Ce qui est important c’est la volonté politique, les moyens  matériels et financiers».

Les travaux de ce comité sont si importants qu’il juge nécessaire d’impliquer les étrangers. Un fait qui, selon Me Cheick Sako, surprendrait d’autres. Or, cela n’est pas un fait du hasard soutient-il. «Certains seront surpris de la présence de l’Union européenne et de l’ambassade des États-Unis. Parce que pour l’instant, c’est les deux bailleurs de fonds qui se sont manifestés. Les systèmes des Nations unies aussi ont annoncé des fonds. On attend la matérialisation. Le Comité va chercher d’autres moyens vers d’autres partenaires parce que c’est un procès qui va durer à minima 6 à 8 mois. Vous avez vu le  procès de Hissen Habré qui portait sur une seule personne, mais là, on va avoir une quinzaine de personnes qui vont être jugées et 450 parties civiles qui vont être auditionnées sans compter d’autres témoins et factuellement d’autres personnes impliquées qui vont s’expliquer à la barre.  Le Comité de pilotage n’est qu’un organe technique, il n’intervient pas dans le procès ».

Tout laisse à croire que ces représentants de la communauté internationale sont prêts à accompagner la Guinée pour la tenue de ce procès. En tout cas, c’est ce qu’a réitéré Séraphine Wakana, coordinatrice des systèmes des Nations unies. «Je voudrais dire ici combien de fois le système des Nations unies est honorée de faire partie de ce comité parce qu’au-delà de deux membres, il y a le HCDH (Haut commissariat pour le doit de l’homme) aussi qui est représenté. Les travaux de ce comité sont importants parce que le procès ne pourra pas se tenir sans les moyens  et sur ce, nous nous engageons à apporter l’expertise qu’on a toujours apportée. Mais, également à faire le plaidoyer pour que les ressources  puissent être mises à disposition et que le procès puisse avoir lieu ». 

Si par endroit les parents des victimes se félicitent de ce pas nouvellement franchi, force est de reconnaitre que le chemin à parcourir reste encore encore long. Raison pour laquelle, les parents de victimes se montrent plus que jamais vigilants dans le dossier, fait remarquer Asmaou Diallo,la présidente de l’ AVIPA(Association des parents et amis de victimes du 28 septembre). «Je voudrais dire, au nom de toutes les victimes, qu’on est vraiment satisfait du processus qui commence à aller de l’avant. Notre rôle c’est de continuer à veiller. On ne va pas rester à côté et penser que tout est acquis.  Nous serons toujours là jusqu’au moment du procès et à la réparation pour les victimes, qui ont trop souffert et qui ont besoin de soutien. Avec ce procès, le pays va sortir dans cette situation d’impunité. Il faut donc que le dossier du 28 septembre soit jugé pour que la Guinée puisse retrouver la voie normale parce qu’on est dans une obscurité totale. J’encourage ce comité à travailler dur comme on a entendu les engagements ».

Toujours est-il que parmi les personnes inculpées dans le dossier du massacre du 28 septembre, il y a peut être des innocents. Mais seuls les juges pourront démontrer qui est coupable et qui ne l’est pas à l’issu du procès.Les défenseurs des droits de l’homme eux, restent attachés à la présomption d’innocence même en étant partie civile. Elhadj Malal Diallo, le président de l’OGDH (Organisation guinéenne pour la défense des droits de l’homme) invite le comité de pilotage à plus de diligence dans le travail. «Nous lançons un appel au comité pour qu’il soit diligent en vue d’aller le plus rapidement possible à un procès pratique. En tant que défenseurs des droits de l’homme, nous sommes avec les victimes c’est vrai, et nous sommes partie civile dans ce procès, mais nous protégeons en même temps les accusés. Nous tenons à la présomption d’innocence comme à la prunelle de nos yeux. Il ne s’agit pas de faire du n’importe quoi. Il s’agit pour la justice de nous aider à ce que la vérité se manifeste. Et que tous ceux qui sont impliqués, que chacun en ce qui le concerne soit condamné ou acquitté en fonction de la conviction de la justice ».

Pour l’heure, aucune date n’est annoncée pour l’ouverture du procès. Kassory Fofana rassure que les autorités guinéennes joueront leur partition pour faire éclater la vérité. « Je voudrais dire ici tout l’engagement du président de la République et de son gouvernement de faire toute la lumière en terme de jugement sur les événements du 28 septembre 2009. Le processus a été long, on est près de 10 ans, mais il n’est jamais trop tard pour bien faire. Nous voulons un procès équitable et transparent ».