L’Axe de la colère est arrivé en Haute-Guinée, le fief traditionnel du Président Alpha Grimpeur. Ce 30 juin, les habitants du centre-ville de Kankan sont à nouveau descendus dans la rue pour exiger le retour de l’électricité dans les ménages. Même si ce ne sont pas eux qui lui avaient donné la permission de partir. Une première manif ‘’beaucoup plus souple’’ avait déjà eu lieu le 22 juin dans la ville. Une médiation à l’initiative du Gouverneur de région, accompagné du maire de la commune urbaine de Kankan avait permis de calmer les manifestants, le temps pour ces deux responsables, de transmettre leurs doléances au Prince de Sékhoutouréya.
L’attente n’aura duré qu’une petite semaine. A l’initiative du Mouvement citoyen pour l’électrification de la Haute-Guinée, les habitants de Kankan ont pris d’assaut les grandes artères de la ville. Ils avaient prévu de démarrer la manif au carrefour Komarala, mais les flics ont tôt fait de boucler le lieu. Les protestataires se sont finalement rassemblés au quartier Timbo. Ils ont pris la direction de la préfecture et de l’Electricité de Guinée via le rond-point Dalako. Avec des banderoles très peu tendres sur lesquelles on pouvait lire : ‘’La jeunesse de Kankan réclame le courant’’ ; ‘’ Nous voulons le courant chez nous comme chez le Président’’ ; ‘’Nous sommes guinéens comme vous ‘’.
Tout allait bien jusqu’au quartier Météo, près du lycée Morifindian Diabaté. Les Forces de Dépense et de Sécurité ont bloqué net ces manifestants. Elles les ont intimés de rebrousser chemin. Un « niet » à la soviétique leur est opposé et les choses sérieuses commencent : gaz lacrymogènes contre jets de pierres, le tout, ponctué de course-poursuites dans les divers quartiers de Kankan. « Nous sommes dans la rue depuis 8h, nous voulions organiser une marche pacifique pour faire comprendre à tout le monde que le pouvoir a oublié Kankan et la Haute-Guinée. Il y a des affrontements entre manifestants et policiers. Ils tentent d’étouffer la manifestation. Mais nous sortirons vainqueurs de ce combat, » s’exclame un des organisateurs. Les manifestants se sont retranchés dans les quartiers. Ils y ont érigé des barricades et ont brûlé des pneus.
La semaine passée, les manifestants ne réclamaient que le retour du courant électrique dans les maisons. Cette fois-ci, ils sont beaucoup plus exigeants : « Nous ne voulons plus entendre parler de groupes électrogènes, nous demandons la construction de micros barrages pour la Haute-Guinée. Nous serons dans la rue tant que le Président de la République ne tient pas ses promesses. Ils n’ont qu’à continuer à dire que nous sommes de l’opposition. Nous sommes un mouvement apolitique, ce que nous voulons, c’est le bonheur de notre région ». La manif a occasionné une paralysie des activités dans la ville de Kankan. Au grand marché, les commerçants ont rapidement baissé les rideaux : « Vu la tension, nous avons préféré fermer puisqu’il y a des affrontements dans tous les quartiers » déclare un commerçant.
Il y a eu de nombreuses interpellations, dont celle du porte-voix du mouvement, un certain Diéssira Laye Condé alias ‘’Béki’’. Les dégâts matériels ont été importants et visent le RPG, le Parti au pourboire et certains de ses admirateurs. Dont la radio de Taliby Dabo, l’un des ténors du RPG de Kankan.
Yacine Diallo