Le tribunal de première instance de Mafanco a rendu sa décision, ce 22 octobre, dans le dossier qui oppose le parquet aux partisans du Front national pour la défense de la Constitution (FNDC), interpellés suite à l’appel à une manifestation le 14 octobre et les jours qui ont suivis. La juge Djénabou Donghol Diallo a renvoyé des fins de la poursuite une quinzaine de personnes. Elle estime que les accusations pour lesquelles ils sont traduits devant Dame Thémis ne sont pas suffisantes pour les retenir dans les liens de la culpabilité. Mais la juge n’est pas allée du dos de la cuillère quand il s’est agi du sort de Aliou Badra Cheickna Koné, 2e maire-adjoint de la Commune de Matam et secrétaire national de la jeunesse de l’UFR. Elle est allée pratiquement dans la même logique que le procureur. L’élu local a été déclaré coupable de provocation directe d’un attroupement non armé, d’usurpation de titre et de fonction, de signe et d’emblème, et d’offense au chef de l’Etat. Pour la répression, il a été condamné à 3 années d’emprisonnement assortis de 2 ans de sursis et à une amende de 500 000 francs guinéens. Ses deux co-accusés Abdoulaye Bangoura et Aboubacar Sylla écopent de 4 mois de prison ferme.

Une décision qui a mis le patron de la jeunesse de l’UFR dans tous ses états. « Nous avons vu des gens parler ici sous le règne de Lansana Conté, ils sont où aujourd’hui ? Alors qu’on ne tente pas de nous effrayer ». Il adresse un tacle particulier au procureur : « Toi, je te dirigerai un jour », avant de crier un dernier ‘’Amoulafé’’. Dans la salle d’audience, c’est le brouhaha total. L’Hymne national entonné par les détenus. Un avocat de s’exclamer : « Le président de la république peut sortir tout ce qu’il a comme forces de l’ordre, comme armée, le projet ne passera point. C’est un verdict synchronisé ». Et la cinquantaine de partisans du FNDC présents devant le tribunal ont juré de continuer la lutte pour barrer la route au tripatouillage de la Constitution.

Le collectif des avocats du FNDC qui dénonçait déjà un tribunal de Mafanco au service du 3e mandat, soupçonne le pouvoir de se servir de la justice pour anéantir toutes les dissidences : « Nous sommes en train de vivre une injustice d’Etat. Le gouvernement a créé deux groupes de citoyens. Il y a des citoyens qui peuvent marcher pour le soutien au 3e mandat sans être inquiétés et d’autres qui sont contre la nouvelle Constitution qui sont traqués, humiliés, emprisonnés, condamnés de façon injuste. L’Etat veut se servir de la justice pour faire taire toutes les voix dissidentes. C’est pourquoi vous avez constaté que par synchronisation les tribunaux de Dixinn et de Mafanco distribuent des décisions de condamnation çà et là. Mais malgré le concours de la justice pour faire taire les opposants au 3e mandat, ce projet ne passera jamais et la lutte continuera jusqu’au bout » déclare Me Faya Gabriel Kamano. Séance tenante, la défense a relevé appel de cette décision. Elle compte désormais sur la Cour d’appel pour redonner la liberté à leurs clients.

Ces personnes, accusées pour la plupart de participation délictueuse à un attroupement, ont été interpellées avant même la manifestation du 14 octobre.

Yacine Diallo