Un an jour pour jour après la suspension de son mot d’ordre de crève, le Syndicat libre des gens-saignants et chercheurs de Guinée (SLECG) a décidé de nouveau de bouder les classes. Le bouillant Aboubacar Sous-mât et ses lieutenants reprochent au goubernement de ne pas prendre au sérieux leur volonté d’empocher la misère de 8 millions de francs glissants de salaire par mois. Ils ont donc déclenché une crève générale et illimitée sur toute l’étendue du trottoir national. Un mouvement suivi un peu partout à Cona-cris. Au Lycée-collège Lambanyi, dans le buisson de Ratoma, il n’y a pratiquement pas eu cours. Le portail principal de l’établissement barricadé, les classes désertes, des élèves bloqués à l’intérieur. Les journaleux n’étaient pas les bienvenus. Mais un surveillant indiscret leur balance que « seuls les membres de l’encadrement ont répondu présents ».

A l’école primaire tout près, c’est pratiquement la même chose. Les écoliers ont attendu leurs maîtres toute la matinée, personne n’a pointé. Vers 11h, devant le délégué général de la zone, des élèves ont commencé à escalader la clotûre, pour rentrer. « On vous connaît tous, on va vous enlever des effectifs de l’école. Si vous partez, vous n’allez plus étudier ici », lance le délégué. Les élèves n’ont rien voulu entendre.

A Kipé, dans la même commune, les cours sont également perturbés. A l’école primaire, l’encadrement monte la garde, pas une trace d’un bouffe-la-craie. Les élèves se surveillent eux-mêmes. Mais le délégué de la zone assure : « Les professeurs étaient là, c’est après la récréation qu’ils sont partis. D’autres vont venir tout à l’heure ». Pourtant, il était 11h 15mn. Le responsable de cet établissement a été moins loquace : « Les gens ne sont pas venus, on ne sait pourquoi, parce que nous ne sommes concernés par une quelconque grève. Les enfants sont là, tout se passe bien ». Vraiment ! Au collège Kipé, les élèves suivaient les cours dans plusieurs salles de classe, mais une dizaine était vide. Mais voici l’aversion du principal : « Nous avons 17 professeurs présents sur 23 programmés. Nous attendons que les autres viennent nous expliquer les motifs de leur absence ». Au lycée du même quartier, accès interdit aux journaleux. « Nous avons reçu l’ordre de ne plus recevoir de journalistes, revenez un autre jour », leur balance le surveillant. Devant le portail, plusieurs membres de l’encadrement de l’établissement et les élèves rencontrés non loin de là, disent n’avoir pas fait cours.

Les écoles sous bottes surveillance

Dans les ruelles qui mènent à ces écoles, la flicaille n’était pas loin. Un véhicule de police était stationné à quelques pas du lycée Lambanyi. Un flic en civil était même déployé devant le lycée, pour repérer d’éventuels fauteurs de troubles. Au Centre-émetteur (Kipé), trois pick-up remplis de flics y étaient postés. La transversale reliant les quartiers Cosa et Nongo a également fait les frais de la colère des p’tis intellos. Entre échauffourées, route barricadée, jets de pierres et de gaz lacrymogène, l’ambiance était électrique. Entre Bambeto et Hamdallaye, les élèves en rogne ont bloqué la circulation plusieurs heures. À la mise en ligne de cet article, une lycéenne avait succombé à la répression de la manifestation. Pour que vive l’éducation. Woïka !

Yacine Diallo