Depuis quelques semaines, les harcèlements judiciaires contre les responsables et militants du Front national pour la défense de la Constitution ont pris une nouvelle tournure. Si les Guinéens gardent encore en mémoire les arrestations dans des conditions rocambolesques de certains meneurs du FNDC en octobre dernier, c’est un nouveau phénomène que la flicaille est en train d’expérimenter : l’enlèvement de citoyens en pleine rue ou nuitamment dans les concessions. Beaucoup de familles en banlieue ignorent actuellement où se trouvent leurs fils. Les derniers cas les plus célèbres c’est l’arrestation en N’zérékoré et le transport à Cona-cris en violation de la procédure de Fassou Gomou, ancien du RPG, membre du FNDC dans cette région et celle d’Abdourahmane Bella Bah, activiste de la société civile et opposant à la nouvelle Constitution. Les deux personnes sont désormais libres, mais ont passé une dizaine de jours en détention. Une nouvelle méthode de la flicaille qui inquiète défenseurs des droits de l’homme et avocats (sans vinaigrette). Me Salifou Béavogui tire la sonnette d’alarme : « Ces derniers temps nous assistons à des arrestations musclées de citoyens libres qui auraient pu être convoqués. Des personnes non identifiées, cagoulées qui n’ont aucun signe distinctif qui prouve que c’est la police ou la gendarmerie, mais ils viennent te surveiller et te pourchasser toute la journée et à un moment donné ils tombent sur toi, te mettent une cagoule. Quand on a besoin d’un citoyen mieux vaut le convoquer, il va venir avec ses avocats. Aujourd’hui les Guinéens ont les yeux ouverts, chacun connaît ses droit et ses devoirs. Il faut convoquer les citoyens au lieu de tomber sur eux dans la rue. Sinon ils vont tuer beaucoup de Guinéens parce que s’ils tombent sur quelqu’un qui est cardiaque, il va trouver la mort dans leurs mains ».

Ce membre du collectif des avocats qui défendent les citoyens arrêtés dans le cadre des manifs anti modification de la Constitution fustige le deux poids deux mesures qui caractériserait le système judiciaire guinéen : « Depuis cinq mois nous tournons dans des juridictions pour défendre des personnes qui sont membres du FNDC et qui expriment leur opposition à l’idée d’une nouvelle Constitution. C’est curieux, ceux-là qui expriment leur volonté de tripatouiller la Constitution, qui font des déclarations fracassantes ne sont jamais poursuivis. Il y a toujours le deux poids deux mesures ».

Ce phénomène est loin de prendre fin. D’autres personnes hostiles au projet de nouvelle Constitution seraient déjà dans le viseur de l’État.

Yacine Diallo