La dette extérieure Guinéenne est en hausse plus qu’elle ne l’a été avant l’obtention de l’Initiative des pays pauvres très endettés, IPPTE en 2012. Face à cette hausse sans précédent, il nous paraît opportun de se saisir du sujet et d’expliquer les conséquences d’une telle hausse sur l’économie nationale au cours des prochaines années.
Après l’obtention, en septembre 2012, du point d’achèvement de l’Initiative Pays Pauvres Très Endettés (IPPTE), l’on avait cru que l’on s’était totalement tiré d’affaires. Cependant, en 2013, la dette extérieure de la Guinée tournait autour de 1,4 milliards après avoir bénéficié d’une réduction de 2,1 milliards USD de sa dette multilatérale. Estimé à 2,17 milliards USD en 2018, le niveau de la dette du pays était à 1,34 milliards USD en 2014, selon la BCRG. En fin décembre 2019, la dette extérieure guinéenne s’est élevée à 4,29 milliards de dollars, a-t-on appris lundi dernier dans une note de la Banque centrale de la République de Guinée. Ce chiffre pourrait être revu à la hausse comme à la baisse si l’on en croit aux autorités. Mais en attendant cette revue, le constat est que la dette publique de la Guinée s’est accrue ces dernières années de manière drastique. Toute chose qui confirme l’inquiétude du FMI et de la Banque mondiale qui recommandent fréquemment aux autorités guinéennes de veiller à la hausse des dépenses publiques, sur le mécanisme d’endettement, tout en appelant à limiter les emprunts non concessionnels et à gérer rationnellement le stock de la dette, afin de maintenir sa viabilité. Même si l’encours de la dette publique ne représente que 36% du PIB (Produit Intérieur Brut).
Au cours de la même année, le service de la dette extérieure ne représentait que 100,9 millions de dollars. Soit environ 17% des exportations des biens et services du pays. Ce qui est énorme pour un petit pays comme le nôtre.
Si le niveau de cette dette arrivait à être confirmé par la BCRG très prochainement, il ressortirait donc que la Guinée s’est endettée entre 2013 et 2019 plus qu’entre l’indépendance et 2011 (période où le niveau de ses emprunts à l’étranger se situait à 3,4 milliards USD après bien sûr 9 passages devant le club de Paris qui a restructuré la dette de la Guinée et ceci du 1er janvier 1986 jusqu’au 17 février 2012, pour un montant total de 2 259 millions USD).
Le niveau de la dette actuel est aujourd’hui trop important et affectera ainsi l’économie de façon négative dans les prochaines années. Le service de la dette, qui correspond à l’annuité mais aussi composé du principal à rembourser et des intérêts, va augmenter de façon remarquable et empêcher ainsi la réalisation des projets de développement important dans le pays. Il faudra craindre dans le futur des taux de croissance faible, voire négatif, compte tenu de la hausse du taux d’endettement.
La hausse constatée de la dette extérieure aura aussi un effet négatif sur les taux d’intérêt, dont la hausse entraînera la baisse de l’investissement. De plus, lorsque les investisseurs qui viendront s’installer anticipent un défaut de paiement de ce dernier, ils anticiperont des hausses de primes de risque, ce qui va augmenter systématiquement les taux d’intérêt pour la dette privée et la dette publique.
Pour pallier à ces éventuelles conséquences, la Guinée devra faire face aux besoins légitimes de financement de son développement, en recourant davantage à la dette intérieure plutôt qu’à celle extérieure. Dans le même sillage, nous invitons les autorités à revoir les politiques publiques de façon à supprimer les déficits jumeaux (déficit commercial et déficit des finances publiques), car, en plus de ses effets nocifs sur la dette, cette situation amenuise fortement les réserves de change de la BCRG et rend impossible toute action visant à défendre la monnaie guinéenne en cas d’attaque spéculative.
Enfin, nous pensons que cela ne passera pas sans l’amélioration de la compétitivité de l’économie guinéenne qui nous paraît d’ailleurs, à date, très faible.

Mamadou Safayiou Diallo
Analyste Economique