La pandémie du Covid-19 affecte tous les secteurs de l’économie du bled. La production et le transport des produits alimentaires tournent au ralenti. Certains marchés de Cona-cris, alimentés par l’intérieur du bled, commencent déjà à vider leurs stocks. La rareté des denrées pointe du nez. Hop-là !
Au marché du quartier Tannerie, appelé Magnalon, les produits vivriers en provenance de la Guinée Forestière (le grenier du pays) sont rares. Magnalon fonctionne à l’image d’un marché hebdomadaire. Tous les jeudis et vendredis, il est alimenté par des camions remplis de bidons d’huile rouge, de bananes plantains, de sacs de poudre d’Attiéké, d’ignames, de taros, excusez du peu, en provenance de la Guinée-Forestière.
En temps normal, le marché est bondé de monde, notamment de nounous venues de plusieurs coins de Cona-cris, pour s’approvisionner en produits destinés à la vente en détail dans le reste des marchés de Cona-cris. Mais l’ambiance n’était pas au rendez-vous jeudi 9 et vendredi 10 avril. Seuls trois camions ont débarqué leurs cargaisons, contre une dizaine de camions habituellement.
Louppou Kalivogui, vendeuse de bananes plantains et d’huile rouge : «Cette pandémie cause beaucoup de problèmes à notre commerce. Les produits locaux viennent très rarement et quand ils arrivent, il se trouve que la plupart sont pourris à cause de la longue traversée. Les bananes pourries ne nous rapportent pas assez. Pourtant, je les ai reçues hier, et on était obligé de les prendre, car on avait payé le transport avant le départ du camion de la Guinée-Forestière. »
Tout de même, les prix n’ont pas encore grimpé. Cinq bananes plantains valent 10 000 francs glissants et le régime des bananes de la Basse-Guinée vaut 45 000 francs glissants. Un bidon d’huile rouge de 20 litres se négocie à 75 000 francs glissants.
«L’apparition du coronavirus nous a causés beaucoup de pertes. La route est mauvaise, les camions font plusieurs jours avant d’arriver à Conakry. Il se trouve déjà que beaucoup de produits sont pourris. C’est une perte, car on ne peut pas ajouter toutes ces dépenses sur le prix de vente des produits au marché, sinon la clientèle risque de nous fuir. Actuellement, dans ce marché, ce sont les stocks que nous sommes en train de vider, c’est pourquoi on n’a pas augmenté le prix encore», raconte une autre marchande.
A Magnalon, plusieurs magasins sont quasi-vides. Quelques bananes, ignames, taros, bidons d’huile rouge sont exposés à la vente. Malgré la menace de la pandémie du Covid-19, dans les coins et recoins du marché, nous n’avons aperçu aucun kit de lavage des mains. De rares marchandes portent des masques. Quant à la distanciation sociale, elle est carrément ignorée. Peut-être que Magnalon attend les kits du goubernement qui a lancé le 9 avril une opération de désinfection des marchés de Cona-cris, supervisée par l’Agence nationale d’inclusion économique et sociale, ANIES.

Yaya Doumbouya