Alpha Condé est un animal médiatique. Il a l’art d’enflammer toile et médias à chacune de ses sorties. Répondant aux questions de nos confrères de RFI et France 24 le 6 octobre, le chef de l’État a multiplié les approximations et les problèmes d’élocution. Notre Grimpeur en chef a tenu à nous faire remarquer qu’il ne comptait pas “vendre la peau de l’ours”, mort ou vif. Son message, passé “comme une boite à la lettre”, a déchaîné les réseaux sociaux qui n’en finissent pas de se marrer. Parmi ses lapsus, un a particulièrement attiré l’attention. Alpha Condé a usé par deux fois des termes “face news”, en lieu et place de “fake news”. Depuis, chacun y va de son commentaire.

Ce lapsus est pourtant révélateur de l’association mentale que notre président fait entre le réseau social Facebook et les fake news, fausses nouvelles dont on intoxique les internautes guinéens. Facebook, c’est les fake news, du moins dans la tête du Président. Un résultat qu’on pourrait mettre au crédit de la cellule de communication de la mouvance, véritable milice médiatique au compte du RPG et rémunérée par l’État, la majorité de ses membres étant fonctionnaires.

Comme nous l’évoquions il y a quelques jours, trois chercheurs américains de l’université de Stanford se sont penchés sur le cas de Volcom, un réseau de pages et de profils agissant de façon coordonnée pour manipuler l’opinion publique sur Facebook. Ces pages, qui comptent au total plus de 800 000 abonnés, publient des textes et des images pro-Grimpeur, et promeuvent des vidéos de médias affiliés au goubernement. Les techniques utilisées présentent des similarités avec les campagnes de manipulation qui ont visé les précédentes élections présidentielles américaine et française. L’existence de ce réseau est un cas particulier. Les chercheurs de Stanford et les experts de Facebook se sont retrouvés devant une première. Aucune loi guinéenne ne traite de propagande, encore moins lorsqu’elle est faite par le biais de moyens électroniques et qu’elle est susceptible de fausser le jeu démocratique. Nullum crimen, nulla poena sine lege. Aucun crime, aucune peine, sans loi. Comment protéger la liberté de penser dans ces conditions ? Que faire si l’affirmation du Président-Grimpeur, selon laquelle la Guinée est le 4ème pays le plus exposé aux “face news”, se révélait être elle-même une fake news pure et simple ?

Mohamed Diallo