Il était l’un des invités au colloque sur la monnaie Eco qui a démarré à Lomé ce mercredi 26 mai, pour trois jours. Mais Cellou Dalein Diallo, président de l’UFDG, n’a pas pu se rendre dans la capitale togolaise. La raison, une mesure d’interdiction non encore formelle de sortir de la Guinée qui le frappe, lui et plusieurs de ses proches depuis la présidentielle du 18 octobre dernier. Sydy Souleymane N’Diaye, procureur de la République près le tribunal de première instance de Dixinn, a dans une déclaration du lundi 24 mai fait savoir que la mesure est en lien avec les violences enregistrées avant, pendant et après le scrutin du 18 octobre 2020. L’opposant qui a déjà été renvoyé deux fois à l’aéroport de Gbessia n’a cette fois-ci pas tenté une nouvelle sortie.

Cela n’a pas empêché le patron du principal de l’opposition de prendre part, aux côtés d’autres économistes du continent, aux débats, du moins, virtuellement. L’UFDG est déjà habitué de tenir ses assemblées générales en direct sur Facebook et You Tube, le siège du parti étant fermé également depuis le scrutin présidentiel d’octobre. L’objectif du colloque de Lomé qui se tient du 26 au 28 mai est d’élaborer une feuille de route, formuler des recommandations pour les chefs d’Etat concernés par l’Eco (l’espace CEDEAO) et discuter des études préalables qui empêcheraient jusque-là le projet de se concrétiser. Mais pour Cellou Dalein Diallo, le débat devrait d’abord porter sur les «contraintes à lever, les critères à remplir pour adhérer à la monnaie commune… Je souhaite que le colloque se consacre à l’identification des coûts et des risques. Evaluer la mise en œuvre des décisions politiques au lieu de tergiverser sur le débat sur le franc CFA».

L’opposant estime qu’il y a notamment des interrogations qui méritent réponse : «On s’est jeté à l’eau, on a créé la ZMAO, nous n’avons pas pu respecter les agendas. Il faut penser sereinement à sa faisabilité. Cette rencontre devrait se pencher sur la feuille de route que les Chefs d’Etat auraient pu suivre. Qu’est-ce qu’on doit faire ? Est-ce que nous maintenons les critères de convergence ? Est-ce que nous les changeons ? Quel délai peut-on donner pour permettre à tous les pays de se conformer aux nouveaux critères de convergence ? Quels mécanismes peut-on mettre en place pour appuyer les pays qui vont être pénalisés ?»

Le débat fait actuellement rage sur le franc CFA, un des derniers vestiges de la colonisation. Des activistes africains accusent la France d’avoir une mainmise sur cette monnaie. A leurs yeux, Paris utiliserait sa position pour maintenir les pays de la zone CFA dans la précarité. Pour le président de l’UFDG, le problème est ailleurs : «Ce n’est pas la garantie qui a fait que le franc CFA est resté crédible, c’est la politique monétaire. Il va falloir définir une politique monétaire pour la banque centrale, indépendamment des garanties de la France ou d’un autre pays. Pour moi, le CFA est passé, les pays de l’UEMOA sont dans une phase transitoire. Ils veulent quitter le CFA pour l’Eco-CEDEAO, mais il faut une garantie pour les rassurer. L’Eco n’a pas encore sa banque centrale, elle n’a pas défini sa gouvernance institutionnelle, sa politique monétaire. On a tout simplement dit que le taux de change va être flottant, mais flottant par à quoi ?»

Yacine Diallo