Le 7 mai, le gouvernement guinéen a communiqué sur les dossiers des opposants et autres citoyens arrêtés dans le cadre des violences survenues au lendemain des élections référendaires, législatives et présidentielle de 2020. Selon lui, les procédures se déroulent dans la « sérénité, dans le strict respect de l’indépendance » consacrée de la justice. « Ainsi, dans l’affaire de l’attaque du train minéralier au cours de laquelle quatre agents des services de défense et de sécurité ont été tragiquement assassinés, le cabinet d’instruction a pris une ordonnance : sur 17 personnes inculpées, 8 sont renvoyées devant le tribunal pour être jugées, et les 9 autres ont bénéficié d’un non-lieu et immédiatement libérées », explique le gouvernement.

En ce qui concerne l’affaire de Chérif Bah, Ousmane Gaoual Diallo et autres, « parmi les 80 personnes inculpées, 31 ont bénéficié d’un non-lieu et remis aussitôt en liberté.  Tandis que 49 accusés sont renvoyés devant le tribunal en vue d’un jugement », que les procès s’ouvriront dès la fin de la grève des huissiers de justice.  « Il s’agit de 30 opposants qui ont été libérés cet après-midi, les autres ont été renvoyées devant le tribunal criminel de Dixinn. Nous allons nous battre maintenant pour faire programmer le dossier. Mais ce qu’il faut préciser, c’est que parmi les 30 libérés, il n’y a pas les grandes figures de proue. (…). C’est pour nous un début de soulagement. Le dossier a quitté désormais le tribunal pour enfant, il est devant le tribunal criminel de Dixinn. Cela nous décharge et met un terme au calvaire lié à ces 30 détenus. Il va falloir qu’on se retrouve pour examiner notre possible retour dans le dossier. Parce que nous allons maintenant inéluctablement vers le procès », a réagi leur avocat, Me Salifou Béavogui.

Un dossier « téléguidé »

Le 8 mai, le FNDC, Front national pour la défense de la Constitution, s’est dit étonné que le communiqué soit présenté par un membre du gouvernement, en la personne de Tibou Kamara, au lieu du procureur de la République. « Cette démarche prouve à suffisance que ce dossier est téléguidé à partir des bureaux du dictateur Alpha Condé. L’indépendance de la justice que l’on chante par-ci par-là n’est qu’une simple incantation car l’inféodation de l’appareil judiciaire pour servir la dictature d’Alpha Condé n’est plus à démontrer », soutiennent-ils.  « Par ailleurs, en faisant état de personnes qui ont bénéficié d’un non-lieu, Alpha Condé veut faire croire à l’opinion nationale et internationale que les juges ont eu les mains libres dans l’instruction de ce dossier. Mais la réalité est toute autre. En faisant semblant d’instruire le dossier (un dossier vide au demeurant) les juges finissent par les libérer comme pour démontrer qu’ils sont indépendants. En réalité, il y a des acteurs politiques et de la société civile qui étaient principalement visés. Dans cette affaire, la justice n’a jamais été et ne sera jamais indépendante », dénonce le communiqué. Et de conclure : « Elle agira toujours suivant les instructions du dictateur Alpha Condé qui, en cas de condamnation, pourrait user de son pouvoir gracieux dans le but d’apparaître comme un homme tolérant. Tout sauf tolérant, Alpha Condé est un égoïste sans cœur qui a ôté tant de vies pour assouvir sa soif de pouvoir. »

Yaya Doumbouya