Après l’annonce du décès de M’Mah Sylla, l’Ordre national des médecins de Guinée a rencontré le 22 novembre, le ministre de la Santé pour annoncer le traitement réservé aux médecins présumés coupables de viol sur la jeune dame, décédée en Tunisie, suite aux complications liées au viol qu’elle aurait subi.
Au sortir de la rencontre, Pr Hassane Bah, président de l’Ordre national des médecins de Guinée, a d’abord présenté des condoléances. «Je voudrais présenter, au nom de l’ensemble des médecins de Guinée, nos sincères condoléances à la famille éplorée, à tout le peuple de Guinée, à toutes ses associations qui se sont mobilisées, qui ont mis cette chaîne de solidarité, pour permettre à cette femme de bénéficier des soins, et en Guinée et à l’étranger (…) C’est une situation triste, vraiment déplorable. Cette jeune femme a été effectivement victime d’un viol par des soi-disant médecins, parce que jusqu’à preuve du contraire, en tout cas en ce qui me concerne, ils ne sont pas inscrits dans le conseil de l’Ordre des médecins. Pour moi donc, ce ne sont que des délinquants sexuels qui l’ont violée d’abord plusieurs fois, avant de tenter cette opération. Ils l’ont opérée, contrairement à ce qu’ils pensent, sur le plan chirurgical, l’utérus était intact. (…) Ils ont juste sauvé son intestin grêle qui s’est déchiré… Embarrassés devant ce tableau, ils l’ont évacuée sur Ignace Deen (…) Malheureusement, le fait de l’avoir opérée plusieurs fois, avant de l’envoyer à Ignace Deen, le tissu était complètement affaibli et on n’a pas un plateau technique qui pouvait assurer une bonne prise en charge (…) Elle a été évacuée sur la Tunisie. » D’ajouter qu’il était en contact avec ses collègues médecins tunisiens, mais malheureusement, M’Mah Sylla est décédée, suite à une septicémie. «En tant que guinéens, on est choqué. En tant que médecin, on est révolté. Nous avons décidé quelle que soit l’issue du procès, de les radier de façon définitive sur le tableau de l’Ordre des médecins, avec interdiction d’exercer la profession de médecin en Guinée», a annoncé Pr Hassan Bah.
Le Professeur rappelle que l’Ordre des Médecins est un organe consultatif du ministère de la santé, ce n’est pas une institution qui prend des décisions et qui sanctionne. «C’est vrai que nous avons un pouvoir juridictionnel qui est tout à fait disciplinaire, c’est ce que nous avons fait valoir d’ailleurs dans ce cas-là, parce qu’il peut aller jusqu’à interdire l’exercice de la profession. La décision a déjà été prise au niveau du conseil. Mais, il ne nous appartient pas de réglementer l’exercice de la profession et il ne nous appartient pas non plus d’aller inspecter les cliniques, pour vérifier celles qui remplissent les conditions d’exercer. Il y a une inspection générale de la Santé au niveau du département de la Santé qui a pour rôle de veiller non seulement à l’installation mais aussi au suivi des actes médicaux réalisés dans les cliniques privées. Donc, ce n’est en aucun cas le devoir de l’Ordre des médecins. Notre devoir, c’est celui de la moralisation de la profession, ce que nous faisons à toutes les occasions pour rappeler les règles éthiques et déontologiques qui régisse l’exercice de la profession médicale», explique Pr Hassane, qui appelle la justice de sévir, parce que, affirme-t-il, «lorsqu’on ne respecte pas ce principe éthique et déontologique», on répond au coup de la justice, comme c’est le cas. Selon lui, l’un des trois médecins interpellés avait été renvoyé de la Faculté de Médecine, pour avoir triplé la troisième année.
Pour réglementer l’exercice de la profession médicale où règne une « anarchie », Pr Hassane Bah estime que l’État doit réglementer même au niveau de la tenue, à travers le ministère de la Santé, l’exercice de la profession médicale. D’autant qu’on ne s’improvise pas chirurgien ni gynécologue. Et de mettre le pied dans le plat : « Nous formons plus de 1 000 étudiants par an, plus les universités privées, mais qui ne sont pas employés, l’État n’embauche pas. Imaginez ces médecins formés qui se retrouvent dans le marché du travail, qui retournent dans les quartiers, dans les villages, etc., ils font de l’exercice illégal de la médecine. En plus de ce que l’Ordre des médecins doit prendre pour organiser, l’Etat doit prendre toutes ses responsabilités pour non seulement mettre en place un numéro scolies par rapport à la formation des médecins, adapter la formation par rapport aux besoins de l’emploi, pour ne pas former plus de médecins qu’on en a besoin (…) », a-t-il proposé.
L’ordre général des médecins de Guinée se constitue partie civile, dans le dossier, pour défendre l’honneur de M’Mah Sylla et redorer l’image de la médecine qu’il dit avoir été souillée par des « délinquants sexuels ».
Kadiatou Diallo