Alors que la police a arrêté et détenu pendant plusieurs jours neuf journalistes le 10 mars dernier, deux d’entre eux sont maintenant poursuivis pour cyberharcèlement contre le président ougandais et restent détenus. Reporters sans frontières (RSF) appelle à leur libération immédiate.

Le séjour en prison des journalistes Norman Tumuhimbise et Farida Bikobere se prolonge. Arrêtés avec sept autres collègues le 10 mars, le directeur de Alternative Digitalk TV, une télévision en ligne critique du pouvoir et une journaliste du même média ont été accusés de « communication offensante » et de “cyberharcèlement” contre le président Yoweri Museveni. Les deux journalistes ont été placés en détention provisoire à la prison de haute sécurité de Luzira, dans un quartier de la capitale Kampala, jusqu’au 21 mars, date à laquelle le tribunal examinera leur demande de libération sous caution. Il leur est reproché d’avoir relayé des informations sur deux livres de Norman Tumuhimbise devant paraître le 30 mars et qui abordent de manière critique la politique du président ougandais depuis son arrivée au pouvoir en 1986. Leurs sept collègues ont été libérés sous caution mercredi 16 mars, mais leur matériel ne leur a pas été rendu.

Six jours plus tôt, les forces de sécurité avaient pris d’assaut les bureaux d’Alternative Digitalk TV, et avaient confisqué leurs équipements, dont leur camionnette, avant d’arrêter les neuf journalistes.
Contacté par RSF, l’avocat des journalistes, Eron Kiiza, a qualifié cette détention d’”arbitraire et illégale, car contraire aux deux jours prévus par la loi”.

«Ces journalistes ont été arrêtés en masse et détenus au secret sans accès à un avocat pendant plusieurs jours comme s’ils préparaient un attentat, déclare Arnaud Froger, responsable du bureau Afrique de RSF. Un livre critique du président et vous êtes traité comme des terroristes présumés. La détention prolongée des deux journalistes qui croupissent encore en prison est aussi grave que infondée. Nous demandons l’abandon des charges et leur libération immédiate. »

Les journalistes font régulièrement face à des intimidations, menaces et sanctions en Ouganda. En mai 2021, deux journalistes avaient passé trois semaines derrière les barreaux pour des faits de diffamation présumée. Deux mois auparavant, le président lui-même avait menacé de “pousser à la faillite” le principal quotidien du pays, le Daily Monitor, qui avait relayé des informations révélant que des membres proches du président s’étaient secrètement fait vacciner contre la Covid-19.

L’Ouganda a perdu 28 places depuis 2015 et occupe actuellement la 125e position sur 180 pays dans le Classement mondial de la liberté de la presse établi par RSF en 2021.

Reporters Sans Frontières