Depuis le 20 septembre, les débats se poursuivent à la 77ème session ordinaire de l’Assemblée générale des Nations Unies à New York. La situation sur la transition guinéenne a été l’un des sujets qui a animé ce sommet. Le Premier ministre, Bernard Goumou, qui a représenté la Guinée, a tenu un discours rassembleur.
Dès l’entame, il a souligné que la participation de la délégation guinéenne à cette session, permet d’apporter des informations sur la situation du pays et d’apprécier celle internationale. Il rappelle que la Guinée a connu des moments difficiles dans sa gouvernance. « Malheureusement, durant la dernière décennie, le régime qui était en place n’a pas dérogé à la règle ». Bernard Goumou accuse le régime d’Alpha Condé d’avoir politisé à outrance des instances de l’État, commis des violations de l’Etat de droit et de gabegie financière. Il justifie le putsch militaire du 5 septembre 2021 par les troubles sociopolitiques, occasionnés par la modification de la constitution en 2020, la suppression de la limitation du mandat présidentiel à deux. Pour lui, face à cette situation désastreuse et la nécessité de parer aux dérives du pouvoir, « les Forces de Défense et de Sécurité, unies au sein du Comité National du Rassemblement pour le Développement (CNRD), dans un élan de solidarité et de patriotisme, ont pris leur responsabilité en vue d’établir une gouvernance vertueuse profitable aux populations guinéennes, notamment les femmes et les jeunes, avec pour objectif un développement inclusif et durable ».
Rappelant les attentes exprimées par la population lors des concertations entre le CNRD et les Forces vives de la Nation, pour convaincre l’auditoire, le PM rappelle qu’un état des lieux a été réalisé afin de convenir des solutions appropriées aux défis identifiés et de relancer le pays. Ce sont, entre autres, la refondation de l’État pour moraliser la vie publique et restaurer l’autorité de l’État, le redressement visant à rompre avec les anciennes pratiques en vue de réformer, de moderniser et de rajeunir l’administration, le rassemblement du peuple, dans son entièreté, dans la conduite des affaires publiques en toute transparence et le respect de tous les engagements aux niveaux national et international.
Après une année de gouvernance, la durée de la transition guinéenne n’est toujours pas établie. En bras de fer avec la Communauté Économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), le Premier ministre indique le recensement général de la population et de l’habitat et celui administratif à vocation d’état-civil, qui nécessiterait «24 mois pour leur réalisation et 12 mois supplémentaires seront nécessaires pour la tenue des trois scrutins programmés ». Ce qui, selon lui, garantira les processus électoraux transparents et des résultats acceptés de tous.
Dialogue et procès du 28 septembre
Dans un récent décret, le président de la Transition a annoncé la création d’un cadre de dialogue inclusif inter guinéen, placé sous l’autorité du chef du gouvernement. Sur ce point, Bernard Goumou nourrit l’espoir de voir « les acteurs politiques réticents, dans un sursaut de conscience patriotique, se joindre à ce cadre ». Il explique qu’en ce moment, « aucun obstacle ne se dresse sur le chemin du cadre inclusif en Guinée » et rappelle que, sans aucune pression, les membres du CNRD, du Gouvernement et du CNT ne seront pas candidats aux différentes échéances électorales prochaines.
En matière de justice, après plusieurs réformes judiciaires, le CNRD a fait de l’organisation du procès des événements du 28 septembre 2009, une priorité nationale après 13 ans d’attente. Sauf changement de dernière minute, ce procès doit s’ouvrir le 28 septembre dans un tribunal spécial à Conakry.
Une population épanouie
Dans ce discours, Bernard Goumou, promet que l’assainissement des finances publiques et les réformes engagées dans le secteur minier, notamment la fixation du prix indiciaire de la bauxite, permettront aux populations de bénéficier des dividendes de la croissance de ce secteur. Il réitère l’engagement de son gouvernement, à tout faire pour que les problèmes auxquels le peuple de Guinée est confronté soient examinés judicieusement, afin de trouver des solutions durables. C’est pourquoi, il estime qu’il est nécessaire de mettre en place l’état de droit et des institutions fortes pour une Transition réussie. Il s’est engagé à coopérer avec les partenaires pour honorer ses engagements « dans le respect et la confiance mutuelle ».
Selon lui, la 77ème session ordinaire de l’Assemblée générale des Nations unies se tient à un moment où le monde est confronté à des défis d’ordres sociopolitique et économique. Si le thème de cette réunion est « Un tournant décisif : des solutions transformatrices à des défis intriqués », il explique que son pays apprécie les initiatives lancées sous l’égide du Secrétaire général, Antonio Guterrez, relatives à la paix et à la sécurité internationale ainsi que la voie à suivre pour atteindre les objectifs du développement durable à l’horizon 2030.
« Mon pays partage les préoccupations de la communauté internationale sur les questions de paix, de sécurité, de développement et de droits humains examinées par notre organisation. Il renouvelle sa position traditionnelle sur la recherche de solutions pacifiques et consensuelles à ces questions… Le Colonel Mamadi Doumbouya, panafricaniste avéré, a décidé, en plus du contingent guinéen de la MINUSMA opérant depuis 2013 à Kidal au Mali, de déployer un contingent additionnel en remplacement de celui du Bénin, dont le mandat arrive à expiration en 2023. Mon pays réitère son engagement et insiste dans la lutte contre les changements climatiques et la migration irrégulière ».
Des Nations Unies réformées et justes
À la fin de son intervention, comme s’il se passait pour une victime d’injustice, le Premier ministre guinéen appelle à la réforme de l’Organisation des Nations-Unies pour, dit-il, qu’elle soit « plus juste, plus inclusive et apte à répondre aux légitimes aspirations des peuples du monde. Elle doit s’adapter aux réalités du monde, relever de nombreux défis auxquels l’humanité est confrontée et maintenir son rôle central dans la gouvernance mondiale. »
Revenant sur la situation politique de la Guinée, le chef du gouvernement rassure que la République de Guinée a adopté, comme principes conducteurs, le dialogue inclusif, y compris avec la CEDEAO, le renforcement de l’état de droit, la promotion des droits humains et la reddition des comptes, pour recoudre un tissu national fragilisé, pour la réussite de la transition.
Abdoulaye Bah