Mercredi 2 novembre, 14ème jour d’audience du procès du massacre du 28 septembre 2009, 7ème jour de comparution du commandant Aboubacar Sidiki Diakité alias Toumba. Les avocats de ses coaccusés continuent de l’assaillir des questions, le plus souvent à répétition. Maître Dinah Sampil a voulu savoir plus sur ce que l’accusé appelle garde parallèle ? Toumba répond qu’avant les événements, faisant allusion aux recrues de Kaléya, il voyait des gens étranges au camp Alpha Yaya, base de la junte du CNDD, et le 28 septembre 2009, ils ont été aperçus en train de s’embarquer dans des bus, direction le stade du 28 septembre. Il ajoute qu’à son retour de Kaloum (ville), il avait aperçu ces mêmes gens habillés en maillot de Chelsea vers Dixinn-Landreah, désemparés qui ne connaissaient pas la ville. Capitaine Marcel aurait garé sa voiture, pour « les prendre, j’ai vu cela à travers mon rétroviseur. J’ai un respect religieux pour le président Moussa Dadis, je ne cherche pas à l’enfoncer. Mais, la manifestation de la vérité est thérapeutique pour le peuple. C’est pourquoi, je m’efforce à dire la vérité », soutient Toumba.

Avez-vu la personne physique du Président Dadis au stade ? lui questionne l’avocat. «Je n’ai pas vu la personne physique du président au stade, mais à travers ses hommes capitaine Marcel, Georges avec qui nous étions dans la chambre du président ». Vous avez dit qu’il y avait des infiltrés, d’où venaient-ils, poursuit l’avocat. « J’ai expliqué, ces gens venaient du camp, ils étaient avec Makambo », mort dans la tentative d’assassinat d’El Dadis le 3 décembre 2009. On dit que ces gens étaient encagoulés, comment les avez-vous reconnus ? «C’est vrai que nous ne posons pas de question, mais le moment venu on va demander des preuves.  Je vous dis que j’ai distingué ces gens au Pont 8 novembre, je les ai distingués aussi à Landreah ».

Arrivé au stade du 28 septembre, après le constat de débandade, quelle est la première scène que vous avez constatée ? «J’ai vu les gens qui escaladaient le mur, c’était la débandade ». Vous avez dit qu’au stade, vous avez vu une femme nue,  à quel moment l’avez-vous vue ? « Je sortais du stade avec les leaders ensanglantés, Marcel avait déjà retiré Cellou pour l’amener à la pelouse », dit Toumba. Cela veut dire que vous êtes préoccupé à sauver les leaders que de sauver la femme nue ? hasarde l’avocat. « Non, j’étais avec des leaders ensanglantés avec d’autres militants, je n’ai pas pu. Sinon, j’allais la sauver », répond l’accusé.  Dites-vous que vous avez vu les hommes de Thiegboro coiffés en béret rouge, est-ce que vous reconnaissez une personne entre eux ? «J’ai reconnu Thiegboro, je ne peux pas reconnaître les hommes qui étaient présents, puisque ce n’est pas moi qui les commandais ». Lorsque les troupes vous ont vu porter secours aux leaders, ce qui est contraire à leur objectif, comment avez-vous réussi à sortir indemne ? «J’ai utilisé les 3 V. Allez vite, faire vite, revenir vite. Je suis un commando rangers. C’est contre mon gré que Marcel a soustrait Cellou. Donc, c’est comme ça que ça s’est passé », affirmée Toumba Diakité. A une question de savoir pourquoi Toumba ne souriait jamais et que la renommée n’est pas fortuite?  Celui-ci a expliqué qu’il a été trop caricaturé. Mais les gens n’ont jamais parlé de son métier de médecin. «J’ai fait ma thèse de doctorat encadré par des éminents professeurs. J’ai travaillé à Ignace Deen pendant au moins 5 ans en tant que médecin-chef. J’ai été médecin-chef des forces armées, médecin-chef de la gendarmerie. C’est vrai que je suis un bagarreur. Quand j’étais civil, j’ai été invité par grand Co (Claude Pivi), j’ai réglé tous ses éléments. J’ai bataillé avec son adjoint, je l’ai réglé, je l’ai arraché trois dents. Ils m’ont fait payer l’ordonnance. Mais, je ne suis pas ce que les gens ont fabriqué derrière moi ». 

S’agissant de l’épisode du Camp Koundara où il y a eu la tentative d’assassinat d’El Dadis, est-ce qu’il était surpris de voir celui-ci saint et sauf ? Il a expliqué longuement ce qui s’estpassé au camp Koundara avant de répondre : « Je ne suis pas surpris, parce que je ne suis pas le maître de l’âme de quelqu’un. L’âme appartient à Dieu,  le maître des cieux ». Est-ce que vous avez constaté le pouvoir dans la rue ?  « C’est le président qui a exprimé cela. A l’époque, personne ne pouvait nous arracher le pouvoir ».  Normalement, c’est la police et la gendarmerie qui assurent le maintien d’ordre, mais ce jour comme vous le dites, il y a eu des infiltrés ; à qui vous imputez cela ? Sans hésiter, Toumba répond : « Au président de la République à l’époque, Dadis ». En tant que président de la République ? «Non pas seulement, il était le commandant en chef des forces armées, le commandant du régiment.  Il était avec des gens que j’ai vus à  Landreah. Donc, c’est lui qui est responsable. Je vous ai expliqué son état d’âme, il a dit : ‘’le pouvoir est dans la rue, il faut les mâter, ils vont le regretter ‘’.Tout cela veut dire que c’est lui ».

Me Antoinette Ouédraogo, avocate de Dadis, pose la question de  savoir si le concept garde-parallèle existe dans les textes de loi du pays ? «J’ai utilisé ce mot, pour éviter de dire les choses comme telle, pour ne pas heurter d’autres personnes. Non ça n’existe pas dans nos textes de loi.  Mais le coup d’Etat aussi n’existe pas dans les textes de loi », réplique Toumba.

Les avocats continuent de poser les questions à l’accusé. Les mêmes questions reviennent. Comme l’a dit un avocat, c’est pour savoir si l’accusé est constant dans ses déclarations, depuis le début de son interrogatoire.

Ibn Adama