Bien que dissous, le FNDC a appelé à « une marche pacifique et citoyenne » pour le 16 février dans le Grand Conakry. La date aura révélé avec une précision chirurgicale, le niveau d’avancement du pays dans les domaines fondamentaux de la vie d’une nation libre qui a soufflé sa 65è bougie. La lenteur observée dans le processus de développement du pays a été longtemps attribuée à la domination coloniale. Mais force est de constater que celle-ci « n’a duré que 60 ans. »
Si, après quelque 64 ans d’indépendance et de souveraineté, la démocratie guinéenne marche toujours au bâillon et à la baïonnette, pourquoi ne pas demander au curseur de s’arrêter pour taper du poing sur la table ? Demandons-nous au moins si nous n’avons pas passé nos soixante-quatre bonnes années de liberté à « tricoter le jour pour détricoter la nuit. » Sûr que l’on n’a pas fait du surplace. En matière d’évolution démocratique, vous choisissez d’avancer ou de vous faire devancer. Une réponse tranchée se révélerait à la fois hâtive et prétentieuse.
Apparemment, « le méchant colon » nous a légué de méchants compagnons qui ont pour noms : Parti-État et ses rejetons, le sauve-qui-peut, malvivre, mal gouvernance, mensonge, délation, déshumanisation, négation de l’autre et j’en passe. Le Guinéen moyen ne vaut plus que par et pour ce qu’il vole. Impossible de solder le passé par les multiples changements de régime que le pays a connus. On attend la mort du chef pour opérer le coup d’État salvateur. Malheureusement, la myriade des complots n’aura mené qu’au « fleuve de sang » pour parler comme Seif-Al-Islam, le fils de Mouammar-el-Kadhafi. Sérieusement, y a-t-il un Guinéen pour croire à l’échec d’un complot ourdi conjointement, réellement, par Kaman Diaby et Fodéba Keita contre Sékou Touré ? Allons-donc !
Le 5 septembre 2021, Mamadi Doumbouya casse la monotonie. Il réalise à mes yeux, une vraie œuvre de salut public. Il débarrasse la Guinée de son opposant historique. Le Sénégal l’avait fait par les urnes, la Côte d’Ivoire, par les armes. Gbagbo, se retrouve à la Haye. Cadeau ! Quelque trois mille Ivoiriens au cimetière ! Cadeau également ! On décortiquera tout cela dans l’au-delà.
Ici-bas, le Colonel Doumbouya n’a eu de choix que celui dc gérer l’héritage indigeste de ses prédécesseurs. Comme les autres, il justifie le coup. Contrairement à eux, il publie une charte très claire pour sortir de l’impasse RPG. Il est compris d’office. Suivez :
« Inspirés par la volonté et l’engagement partagé de changement pour le bien-être et le vivre ensemble du peuple souverain de Guinée, ayant conduit à la prise effective du pouvoir par l’armée guinéenne, sous la direction du Comité National du Rassemblement pour le Développement, le 5 septembre 2021 ; Considérant l’adhésion populaire qui en a résulté ; Conscient de la nécessité de bâtir ensemble d’une manière durable les fondamentaux d’une république démocratique stable, unie dans sa diversité et respectueuse des Droits de l’Homme et des libertés publiques… »
Le 16 février, un éminent membre du FNDC « dissous » constate qu’emprisonner « ou empêcher des acteurs politiques ou de la société civile de voyager, instrumentaliser la justice pour réduire au silence toutes les voix discordantes, tuer des manifestants ne mènent pas à une solution viable. » L’Histoire a-t-elle repris ses bégaiements ?
Diallo Souleymane