Le bilan officiel fait état de 9 morts, suite à l’évasion spectaculaire ou de l’enlèvement du capitaine Moussa Dadis Camara, ancien président de la transition et Cie. Le procureur général près la Cour d’Appel de Conakry avait annoncé aussi 6 blessés hospitalisés au CHU Donka. Pris en charge par le gouvernement, ces blessés reçoivent les soins dans le service traumatologie. Nous avons rencontré quelques-uns qui nous ont expliqué les circonstances dans lesquelles ils ont reçu les balles, lors des tirs entre les militaires et les « assaillants ».
Vers 8h le samedi 4 novembre, Amadou Bailo, 18 ans, marchand guidé par la recherche du quotidien a pris sa charrette de café, pour se promener à la recherche de clients, comme d’habitude. Il a quitté Dixinn-Terrasse pour la Cité Donka, lorsqu’il a croisé des militaires qui tiraient « dans tous les sens ». A-t-il été visé ou non ? Ce qui est sûr, la balle l’a atteint au niveau du ventre. Amadou Bailo a certes subi une intervention chirurgicale, mais il n’avait pas encore repris conscience, le 6 novembre, dans la soirée lorsque nous passions par là. « On nous a appelé pour nous dire que des militaires ont tiré sur mon jeune frère, que des gens l’avaient transporté à l’hôpital Donka. Nous ne connaissons pas les circonstances dans lesquelles il a été blessé, mais le gouvernement l’a pris en charge, chaque fois on lui donne des médicaments, il est bien pris en charge », a témoigné son frère Amadou Diakité, qui est venu de la sous-préfecture de Maréla, dans la préfecture de Faranah.
Mabinty Soumah habite le quartier Dixinn, précisément derrière le stade du 28 septembre. C’est dans sa cour qu’une balle l’a atteint au niveau de jambe gauche : « J’étais arrêtée avec mon ami Fatou, lorsqu’une balle a tapé mon pied. J’ai dit à Fatou qu’une balle m’a cogné, une balle, une balle, une balle. Fatou a répondu que c’était un caillou, j’ai rétorqué : non, c’est une balle. Ensuite, elle m’a prise pour m’envoyer dans la maison. Après des voisins sont venus m’aider à attacher mon pied, pour arrêter le sang qui coulait. Ils ont appelé la Croix-Rouge qui est venue me chercher. J’ai toujours mal… »
Tirs sur l’ambulance
Aminata Millimouno a expliqué que le 4 novembre, vers 4h du matin, son mari a subi un accident de la circulation. Transporté dans un hôpital au quartier Entag, les médecins ont référé l’accidenté à l’hôpital Ignace Deen, qui exige alors la présence de sa femme pour l’accompagner. Ainsi, Aminata Millimouno a pris ses enfants pour rejoindre son mari, ils ont tous été embarqués dans une ambulance, direction l’hôpital Ignace Deen. « Nous sommes venus jusqu’au niveau du Pont 8 novembre, nous avons trouvé des pick-up de militaires, garés là-bas. Le chauffeur s’est arrêté, je lui ai dit de klaxonner, il a refusé. Il était toujours arrêté. Je lui ai dit : ils voient l’ambulance, ils ne peuvent pas nous laisser passer, on a un cas d’urgence avec nous. Normalement ils devaient nous laisser passer, parce que c’est l’ambulance. Nous sommes restés là durant 3 à 5 minutes, on a entendu des coups de feu. La première balle a directement touché ma fille qui était assise sur les genoux du motard qui a accidenté mon mari, qui a dit couchez-vous, couchez-vous ! J’ai dit au chauffeur de nous sauver. Les militaires tiraient partout, je criais, j’avais mon bébé avec moi. Quand ils ont tiré une seconde balle, ils ont touché le médecin qui était assis devant, au niveau de sa tête. Le chauffeur, lui, il cherchait à nous sauver, il fait machine arrière, et nous sommes allés à Donka. Arrivée à Donka, j’ai crié, j’ai dit les agents nous ont tirés dessus, venez voir mon enfant. On ne savait même pas que le médecin aussi était décédé, on savait quand-même qu’il a été touché. On est resté là, 10 minutes après, le chauffeur de l’ambulance est parti ouvrir la porte, c’est ainsi qu’il a crié : ‘’Ils ont tué mon docteur, ils ont tué mon docteur’’. Ils ont pris les deux, ils les ont fait entrer. En ce moment, mon mari, lui, il était toujours couché dans l’ambulance. Je demandais aux médecins comment va ma fille, personne ne me répondait. J’ai dit alors essayer de sauver mon mari, parce que la manière dont ma fille saignait je sais qu’elle est déjà décédée… »
Il nous a été demandé aussitôt de quitter la salle où est hospitalisée Aminata Millimouno.
Mamadou Adama Diallo