Lorsqu’en mai 1958, les Généraux français d’Alger exigent le retour aux affaires du général Charles de Gaulle, à Paris, la République française est au bord du précipice. L’Assemblée nationale renverse à un rythme effréné les Présidents du Conseil et les Gouvernements dont certains ont une durée de vie qui n’excède pas 24 heures. A l’époque, le Président de la République élu par les grands électeurs et non au suffrage universel, doit se contenter d’assumer le rôle d’inaugurer les chrysanthèmes. Les rapports de force politiques sont déséquilibrés au détriment de l’Exécutif. Le vote populaire confère au pouvoir législatif de la légitimité dont est dépourvu le pouvoir exécutif. De Gaulle dont on connaît l’égo surdimensionné et la hauteur de vue ne peut s’accommoder d’un tel partage. Il exige que le Parlement et le Président soient tous deux élus au suffrage universel. Pour ce faire, une nouvelle constitution est élaborée et soumise à référendum le 28 septembre 1958.
Ainsi naît la Cinquième République sous la houlette de Charles de Gaulle, sur les cendres de la Quatrième République qui avait été marquée par la déliquescence des institutions républicaines dont la fonction de Président de la République. Les réformes constitutionnelles de 1958 viseront principalement à restaurer cette fonction par le renforcement de ses prérogatives et le rééquilibre de ses rapports avec l’organe législatif qui est le Parlement. Elles ont permis de doter la République Française d’institutions républicaines exécutives, législatives, judiciaires et sociales plus conformes au point de vue du Général de Gaulle. Elu dorénavant au suffrage universel comme les Députés, le Président de la République jouit désormais de la légitimité populaire. Cela met fin à la « dictature » des partis politiques qui ne pouvaient plus, comme ils en avaient pris goût sous la Quatrième République, dissoudre à loisir les gouvernements en renvoyant les Présidents de Conseil.
Sous la Quatrième République, la chienlit avait prospéré et perduré. C’était le temps du ratissage. Durant une soixantaine d’années, les institutions mises en place en 1958 et les mécanismes dédiés à leur assurer un fonctionnement avec l’efficacité requise, ont merveilleusement accompli leur rôle dans la stabilité de l’état république. Des couacs, il y en a eu, mais les rapports de force entre les institutions républicaines ont demeuré tels que de Gaulle l’avait désiré. Les partis politiques sont restés forts mais n’ont plus perturbé le fonctionnement harmonieux de l’Etat au sommet. Une forme de disparité a émergé, obligeant les partis politiques à une rigueur disciplinaire lors des différents scrutins.
Cette perception et organisation de la vie politique française reflétée par la 5ème République a survécu à son géniteur et à bien de soubresauts. Mais depuis quelques années, elle est à bout de souffle. Les Présidents Sarkozy, Hollande et Macron ont contribué à rabaisser la fonction présidentielle. L’ère Macron rappelle les beaux jours de la 4ème République. Il n’y a plus de ligne Maginot entre Droite et Gauche. L’Extrême Droite et Droite classique flirtent. Les lignes de fracture et les repères ne sont plus visibles. Les dernières élections législatives l’ont montré.
Abraham Kayoko Doré