L’occupation anarchique des domaines réservés et le squat des zones « non aedificandi » ne date pas d’hier. En 1972, la partie de l’aéroport, présentement en extension, fut envahie. Sékou Touré avait déclaré que quiconque occuperait un domaine réservé de l’Etat devra payer le gas-oil pour la démolition de sa construction. Il n’a mis aucune menace allant dans ce sens en application. Voulait-il éviter d’alourdir davantage le fardeau des exécutions de l’après-agression de 1970 ? D’aucuns ont pris pour comme un relâchement ou un lâchage du lest, pour faire « amende honorable ». Seulement, cela ressemblait à un laxisme, qui a agaillardi l’incivisme, qui a ouvert la boîte de Pandore dans un pandémonium. De nos jours, Conakry est noyé sous les eaux. Qui l’eût cru ?
Et comme Lucie ‘’casse-tête ‘’ est un Castet(s) pour Emmanuel Macron, qui a donné un coup de tête dans la ruche en dissolvant son Assemblée Nationale, le réchauffement climatique et la montée des eaux sont un casse-tête pour les environnementalistes qui cherchent, comme les lynx à lunettes, la solution sous leurs pieds, tout en sachant pertinemment que depuis la révolution industrielle du XIXème siècle, des milliards de m3 de terre ont été poussés dans la mer pour gagner des millions de Km² d’espace déclaré « non aedificandi » par la nature. Le faisant, ils ont empêché les vagues de pénétrer en profondeur à l‘intérieur des continents pour tout rafraichir. Combien de bras de mer ont été bouchés, empêchant à l’environnement de respirer pour des échanges ? Tout le monde sait que les vagues qui apportent la brise marine, en se retirant, aspirent dans leur sillage l’air chaud et saturé pour le transformer et le purifier en haute mer. Il en va de même pour l’eau trouble qui s’écoule, qui heurte des roches et récifs, qui se clarifie et se purifie. Quoi de plus clair et limpide que l’eau des cascades ? On a envie qu’un réalisateur de Bande dessinée réalise un documentaire à l’intention de Donald Trump, qui a tort de ne pas croire au réchauffement climatique, quand le Canada connaît des incendies de forêt, mais qui (Trump) n’a pas tort de se défiler comme une quenouille et de ne pas « comparaître » dans un débat télévisé avec la redoutable procureure générale de Chicago, qui dit avoir eu affaire toute sa vie aux gus de sa trempe…brrr !
Ceci étant, revenons à Conakry, où, par le laxisme des dirigeants et par incivisme des populations, des Guinéens sont en train de se noyer. A voir les images des inondations à la TV, on est incrédule, mais en revenant en arrière, on peut voir la genèse de ce qui est en train de se dérouler.
La zone de l’aéroport mise sous scellé et veillée par Sékou Touré, personne ne s’y était hasardé et personne n’a été au camp Boiro. La Minière et son Concasseur furent mis à plat pour mettre fin à toute velléité de reprise de la mine, l’espace servira de dépotoir d’ordures provisoire, d’une durée de 25 ou 50 ans, dit-on dire. La zone était interdite d’occupation et d’habitation à cause du château d’eau en hauteur. Les prédateurs domaniaux du ministère de l’Urbanisme et de l’Habitat, le secteur le plus famélique et le plus malfaisant de tout temps, ont trouvé là une source de profits incommensurables par les trafics des autorisations et permis de construire. On ne peut dire combien d’affaires domaniales louches par des cadres de l’Habitat, de mèche avec des chefs de quartier et des imams, vous avez bien entendu, ont été traitées. A la décharge de la Minière, des constructions ont été édifiées au pied des montagnes instables d’ordures. En dépit des mises en garde sur les risques, l’occupation anarchique, méphitique et délétère, les occupants n’écoutaient ni le diable ni le bon Dieu jusqu’à l’éboulement de 2017 qui a fait une demi-douzaine de victimes, l’occasion pour la presse populiste de prendre fait et cause à tort et à travers pour les victimes, de charger les autorités et le gouvernement. Cela n’a fait qu’encourager l’incivisme.
L’occupation anarchique de la Minière était restée gratuite et sans conséquence sous Sékou Touré, c’est Kaporo-Rail qui a suivi sous Lansana Conté. Mais Kaporo-rail figure dans le plan cadastral colonial comme une zone réservée pour le futur centre directionnel de Conakry. Des agents véreux de l’Habitat, toujours égaux à eux-mêmes, n’en avaient cure, ils ont délivré à qui mieux-mieux des permis et autorisations de construire. Le déguerpissement ne s’est pas fait avec des caresses de démocrate sur les joues. Les proprios n’ont pas eu à payer le gas-oil pour démolir leurs constructions. Les déguerpis avaient les documents officiels. Les autorités n’ont pas pipé mot, ont laissé les victimes pour compte, n’ont pas poursuivi ceux qui ont délivré les autorisations moyennant paiement. Vous parlez d’irresponsabilité !
Le singulier dans cette affaire : déguerpissement musclé et sans dédommagement, victimes sans secours ni recours. Cela a été interprété comme le ciblage d’une communauté. Depuis, il y a raidissement social. Voilà comment le laxisme des gouvernants mène à l’incivisme des gouvernés ! La rancœur prend de l’ampleur, la Guinée traverse un moment crucial de son histoire. La réconciliation nationale est indispensable pour enterrer les rancœurs.
On se le rappelle, la presse ne s’est pas privée d’inciter le populo à braver l’interdit de marcher sur les rails, même qu’elle a pris à tort et à travers cause pour un accidenté du train de CBK, imputant la responsabilité à la société de prendre tous les frais de l’accidenté (à vie). Les emprises des rails sont devenues actuellement des espaces habités. Les autorités ne disent rien, la presse populiste est aussi muette. En cas d’accident, ce sont les premiers à se gendarmer et à s’alarmer. La HAC est à plaindre, confrontée qu’elle est à l’inculture des journalistes.
Quand on a entendu parler d’inondations en France, en Chine, à Dubaï, à la Mecque, au Mali, au Niger, en France… on a pensé que ça n’arrive qu’aux autres, mais quand on a vu les images à la TV, sapristi, on est tombé des nues devant le bilan. Pour excuses et faux-fuyants, les autorités ont pointé le doigt sur l’incivisme des populations qui construisent et obstruent les passages des eaux, mais elles ne parlent pas du manque de caniveaux. Les caniveaux existants ne sont pas appropriés, à fond plat et horizontal, ils ne favorisent pas l’écoulement de l’eau. Les ingénieurs des TP avaient-ils fait correctement les levés topographiques ? Y a-t-il un plan d’égout pour Conakry ? La sonnette d’alarme a été tirée il n’y a pas longtemps, mais elle n’a pas été entendue. Il n’y a pire sourd que celui qui ne veut pas entendre. On a attendu de voir les pieds dans l’eau pour sauter.
Le cas d’un étage sur deux murs de clôture est aussi sur le bureau de l’inspection générale du MUHAT depuis l’avènement du CNRD. Cet étage est en partie sur un domaine spolié à un particulier. Les géomètres et les inspecteurs ont marqué d’une croix rouge avec l’initial MVAT-IG (ministère de la Ville et de l’Aménagement territoriale-Inspection générale) sur la partie litigieuse. Une semaine après ce marquage, il y a eu le 5-Septembre 2021. Alors que l’ordre a été d’arrêter les travaux, profitant de la période de mise en place du nouveau gouvernement, l’étage a été vite achevé pour mettre le CNRD devant le fait accompli, les marquages ont été effacés, les photos existent à l’inspection générale du MUHAT. Ce qui est surtout aberrant dans cette affaire, c’est que les sommations et interdictions d’arrêt des travaux n’ont jamais été respectées par un citoyen non-lettré. Maraboutage ou corruption ? La question se pose.
La spécificité dans ce lotissement en T, le « T » est le plan de circulation et d’accès. Deux caniveaux doivent être prévus, un pour la sortie des eaux pour la dizaine de concessions de gauche, un deuxième pour l’autre dizaine de droite, mais l’homme qui se croit tout permis a remblayé et bétonné toute la route devant sa concession pour bloquer la sortie des eaux, pis encore il a construit une boutique jusqu’au milieu de la route du quartier. Il n’y a plus de caniveau sur la route qui va à la mosquée. L’iman et le chef de secteur pataugent dans l’eau pour aller à la prière, ils ne disent rien. En voilà encore des laxistes !
Les populations autour de ce T se sont résignées, elles ont cotisé 500 000 FG par concession, pour remblayer et bétonner chacun devant sa porte, elles ont creusé un caniveau dans l’emprise de la route, elles ont bétonné la route. Les pluies du 24 août sont retournées dans leur concession. Des risques de conflits existent. Si l’Etat laisse les populations aménager les voies publiques à leur idée, si chacun peut faire ce qu’il veut sur la voie publique, les travaux de réparation vont être coûteux pour l’Etat.
On apprend que le MATD veut passer à l’action pour déguerpir les occupants illégaux qui n’ont pas l’autorisation du MUHAT. S’ils ont les permis et autorisations, comme ceux de Kaporo-rail, seront-ils dédommagés ? Y aurait-il poursuite contre ceux qui ont délivré les faux documents ?
Les regards sont tournés vers le MATD et le MUHAT pour les caniveaux et pour juger si un étage sur des murs de clôture sans fondation sur un terrain spolié est tolérable.
Moïse Sidibé