Le 31 octobre dernier, El Hadj Sékhouna Soumah, le Kountigui de la Basse-Côte est décédé dans une clinique à Cona-cris. Sa disparition a bouleversé et plongé les ressortissants de la région dans une grande tristesse. Politiques, acteurs de la société civile et autres citoyens du pays ont aussi exprimé leur tristesse.

Décédé à l’âge de 93 ans, El Hadj Sékhouna Soumah n’avait pas apparu en public depuis plus de deux mois, lui, qui affichait sa position sur l’échiquier politique et faisait des sorties médiatiques fréquentes. Le 1er novembre, sages des autres régions, cadres, connaissances et amis se sont mobilisés à son domicile de Toumanya, dans la commune urbaine de Dubréka, pour présenter les condoléances à la famille du défunt. De même au quartier Nongo à Conakry et dans son village à Tanéné, les condoléances ont été reçues. Partout, ont été organisées des cérémonies de lecture du saint Coran et des sacrifices en la mémoire du patriarche de la Basse Côte. Tout le monde reconnaît qu’El Hadj Sékhouna Soumah était une personnalité qui a marqué l’histoire politique et sociale de la Guinée. Quoi que ses prises de positions aient été quelques fois controversées.

El Hadj Mamadou Diawara

El Hadj Mamadou Diawara, membre du bureau exécutif de la Coordination régionale de la Basse-Guinée, à Toumanya, dit avoir perdu une personnalité joviale, correcte, juste, avec un franc-parler hors pair. « C’est le bon Dieu seul qui peut nous l’enlever aujourd’hui », a indiqué El Hadj Diawara, qui dit avoir côtoyé El Hadj Sékhouna depuis le premier régime guinéen, sous la  révolution de Sékou Touré. Alors que le Kountigui était le chef de la Coordination régionale de Dubréka, lui, il était chef  du Comité régional de Boffa. « Nous avons fait les activités sportives, culturelles et artistiques ensemble », ajoute le doyen. Cette collaboration a continué sous le régime du général Lansana Conté et jusqu’à maintenant, a poursuivi El Hadj Diawara. « J’étais à son chevet à Conakry dans son lit d’hôpital. J’étais à son intronisation en tant que Kountigui à Kindia. Je demande à la Guinée d’accepter, c’est l’œuvre de Dieu. Nous prions pour que Dieu nous donne une autre personnalité qui peut nous suffire, nous dorloter, nous amener sur le bon chemin comme El Hadj Sékhouna Soumah… » Selon ce membre du bureau exécutif de la coordination régionale de la Basse-Guinée, le défunt Kountigui était quelqu’un qui a œuvré pour la paix et la concorde en Guinée. Même qu’il était un rassembleur. « Je ne peux pas compter le nombre de maisons qu’il a construites pour lui-même, ses proches parents et pour les indigents. Il a toujours réconcilié les Guinéens ». Sur le plan politique, il affirme qu’El Hadj Sékhouna a toujours suivi l’homme qui est au pouvoir, citant un proverbe Soussou en ces termes : « On se réchauffe avec le soleil qui brille. »

 El Hadj Aboubacar Ousmane Conté, secrétaire préfectoral des affaires religieuses, imam central de Dubréka, déclare que le décès d’El Hadj Sékhouna est triste pour la Basse-Guinée et la Guinée toute entière. Parce que, selon lui, il appartenait à toute la Guinée, voire à toute l’Afrique pour avoir été utile à tous. L’imam pense que le général Doumbouya est orphelin suite à la mort du Kountigui alors que la transition n’est pas terminée. « Aujourd’hui, le général Mamadi Doumbouya est inquiet, il se demande s’il va avoir un homme comme El Hadj Sékhouna, pour l’aider à bien conduire la transition. »

L’homme au cœur du pouvoir

Né  le 12 Février 1931 à Tanéné, de Momo et de Boutouraby Camara, El Hadj Sékhouna Soumah a commencé la lutte pour le pouvoir à 15 ans, selon Ibrahima Sory Bangoura, secrétaire particulier du Kountigui. Il a été le président de la jeunesse de Tanéné, puis président du comité directeur de Tanéné. El Hadj Sékhouna a participé à la lutte pour l’indépendance entre 1953 et 1954 en tant que chef d’un mouvement appelé « Mouvement  Alpha », avant d’être président de Comité de la révolution sous Sékou Touré. Au  temps  du général Lansana Conté dont il était d’ailleurs très proche, El Hadj Sékhouna a été  président de la Commune rurale de développement,CRD de Tanéné et président des CRD  pendant 17 ans. Il a rendu le tablier pour être Kountigui de la Coordination régionale de la Basse-Guinée en 2016. Sous son autorité morale, la Basse Côte a été toujours proche des chefs d’Etat qui se sont succédé à la tête de la Guinée. Sauf qu’après avoir soutenu l’ancien président Alpha Condé durant son premier et deuxième mandat, El Hadj Sékhouna Soumah s’est farouchement opposé au troisième mandat de celui-ci. Lui tout comme les autres sages du pays avaient fait l’objet d’une séquestration durant 24h, à son domicile de Tanéné, alors qu’ils étaient en réunion contre le 3è mandat d’Alpha Condé. El Hadj Sékhouna laisse derrière lui 4 veuves et de nombreux enfants. Il sera enterré lundi 4 novembre, dans son village natal de Tanéné, après  un symposium au Palais du peuple de Conakry.

Ibn Adama, envoyé spatial