L’affaire Ibrahima Kassory Fofana a de nouveau été évoquée devant la Chambre de jugement de la CRIEF ce 9 décembre. L’audition des médecins du CHU-Donka sur le rapport de la contre-expertise médicale du 2 décembre n’a pas permis au juge de trancher sur l’opportunité de l’évacuation ou non de l’ancien Premier ministre. Le magistrat Yacouba Conté compte entendre de nouveau le prévenu sur son lit de malade ce 10 décembre.
Leur audition était considérée comme un tournant dans l’affaire Ibrahima Kassory Fofana. Il n’en a rien été finalement. C’est même le flou autour de la situation du président du Conseil exécutif provisoire du RPG arc-en-ciel. L’ex-Premier ministre, en détention depuis plus de deux ans, mais hospitalisé dans une clinique de la capitale, cherche à obtenir une autorisation de sortie du territoire pour se soigner. Mais la CRIEF (Cour de répression des infractions économiques et financières) hésite encore.
Le juge décide, une énième fois de rendre visite au prévenu le 10 décembre à la clinique Pasteur pour, dit-il, s’enquérir de son état de santé réel. Yacouba Conté estime n’avoir pas obtenu la réponse à toutes les questions concernant le tableau médical de Kassory Fofana. Ce transport judiciaire sera le deuxième en moins d’un mois. Une visite censée permettre au juge d’assoir sa conviction quant à la nécessité (ou non) d’autoriser le prévenu à se soigner à l’étranger.
Pourtant, Yacouba Conté comptait sur la contre-expertise d’un groupe de médecins pour éclairer sa lanterne. À l’audience du 9 décembre, Denis Bernard Rich, Lansana Fodé Camara et Mamadou Sarifou Diallo ont comparu. Ils se sont contentés de confirmer les conclusions de leur rapport médical.
Selon Mamadou Sarifou Diallo, ils ont examiné un Kassory alité, se plaignant de douleurs au dos. Il confirme aussi la nécessité pour le prévenu de « bénéficier d’un contrôle médical plus d’un an après son intervention chirurgicale ».
Dénis Bernard Rich, en tant que représentant de l’administration du CHU-Donka, se garde de se prononcer sur l’épineuse question de l’évacuation de Kassory : « Présentement, le plateau technique de l’endoscopie est en extension. Nous n’avons pas de service pour réaliser les examens complémentaires sur le patient Kassory Fofana. Mais nous ne connaissons que la situation de Donka ». En dépit de la rénovation tant vantée de l’hôpital national Donka ?!
Le professeur Lansana Fodé Camara ne dit pas mieux : « Notre plateau ne peut pas réaliser une coloscopie… Mais l’examen clinique que nous avons effectué ne nous a pas permis d’aboutir à un diagnostic. Nous ne pouvons élaborer un plan de traitement ou recommander un centre spécialisé. »
La défense déçue et suspicieuse
L’insistance de la défense n’a pas fait changer d’avis les experts médecins. D’où la colère de maître Sidiki Bérété. L’avocat de Kassory Fofana estime que les médecins ont fait dans la langue de bois : « On ne peut pas être expert dans ce domaine et ne pas être en mesure de savoir si cette maladie se soigne en Guinée ou non. Ils savent que Kassory ne peut pas être soigné en Guinée, mais ils n’osent pas le dire. Permettez à Kassory, pour ce qu’il a été, d’aller se soigner. » Le docteur Mamadou Sarifou Diallo de rétorquer : «Si on connaissait un centre spécialisé, on l’aurait indiqué ».
L’affaire est renvoyée au 11 décembre pour la suite des débats. Ibrahima Kassory Fofana est en prison depuis avril 2022. Il est poursuivi par le Parquet spécial près la CRIEF pour « détournements de deniers publics, enrichissement illicite et blanchiment de capitaux». Des faits que le prévenu balaie du revers de la main. Mais depuis, son procès peine à démarrer véritablement. Outre l’argument de la maladie, Kassory Fofana conditionne sa comparution à sa remise en liberté. Ce à quoi s’oppose le ministère public.
Yacine Diallo