Charles Wright a déjà brisé le tabou : « qui construit une prison y entrera le premier. »  Et le bouillant ministre de la justice de relancer le projet de construction de la maison d’arrêt de Yorokoguiah, dans la préfecture de Dubréka. A l’allure où vont les choses, l’hôtel 5 étoiles de Coronthie ne pourra plus contenir ses honorables hôtes. Les arrivées montent crescendo, provoquant la surpopulation carcérale et l’ire des organisations de défense des droits de l’homme.

Pour désengorger la maison centrale de Cona-cris, les autorités n’auront de choix que celui de construire de nouvelles prisons. Paradoxe, plus les arrestations et les condamnations se succèdent, plus têtus se révèlent les détournements. Si l’objectif des emprisonnements est de freiner l’ardeur des bandits à col blanc, il tarde à produire ses effets. Mais la CRIEF ne semble pas baisser les bras pour autant. Elle s’affirme  plutôt comme un véritable cauchemar pour anciens dignitaires et actuels gestionnaires. Épargnant curieusement plus d’un dodu du moment.

Réunir en taule le Cas Sorry, Amadou Damaron-ron Cas-Marrant, Ibrahima Courroux-mât, Dr Diané, Mendiant Sidibé, Mory Cas Marrant, le patron du fisc, ou encore celui des Gabelous, est en soi un exploit. Il est superflu de dire à haute et intelligible voix que le palais Mohamed V est exposé à des pressions familiales et communautaires de nature à empêcher Aly Touré de la CRIEF de pro-crier trop fort. Mais, c’est certainement mal connaitre un légionnaire.

Ainsi, nul besoin d’être dans les secrets du ciel pour attendre d’autres hôtes de marque, indélicats, à l’hôtel 5 étoiles de Coronthie. Devant une telle situation pour le moins abracadabrante, l’ennemi le plus froid du Général Doum-bouillant doit reconnaître à celui-ci cette audace. Même si pour certains, l’opération en cours n’est que de la poudre aux yeux. D’autres parlent déjà de règlement de colt. Mais comme dit le vieil adage, le vaincu ne manque jamais d’excuse pour justifier sa défaite. En tout état de cause, ce séisme judiciaire est une première dans le pays. Il faut craindre ou espérer que, comme la Révolution, l’opération sera globale et multiforme.

Le seul aspect qui assombrit le tableau élogieux de la lutte contre l’impunité est la disparation, elle aussi multiforme, de certains activistes de la société civile, accompagnés de bouillants journalistes ou de hauts fonctionnaires que l’on croyait tranquilles. Pour la majorité des Guinéens, loger ceux-ci à la même enseigne que les fossoyeurs de notre économie relève d’une regrettable confusion des genres. Si demain, les prisonniers d’opinion recouvraient la liberté pour laisser les délinquants économiques en taule, le CNRD verrait « sa côte de vraie popularité monter auprès du peuple. » Mais tant que des innocents continueront à croupir en taule ou à choisir la disparution forcée, le Guinéen lambda aura du mal à distinguer la bonne graine de l’ivraie. Corruption et impunité auront été les compagnes les plus fidèles de notre Guinée chérie, aussi bien coloniale qu’indépendante.

Habib Yembering Diallo