Devenir dure longtemps, c’est l’autographie de Mamadi Camara, ancien ministre de l’Économie et des finances d’Alpha Condé. Un ouvrage de 269 pages.

Mamadi Camara connaît un succès précoce. Après la soutenance de son mémoire de fin d’études, le jeune Camara, en compagnie d’autres camarades, visite l’Union des Républiques socialistes Soviétique. Pendant deux semaines de juillet 1971. Ce séjour au pays de Lénine récompense, les meilleurs étudiants guinéens. Le jeune  diplômé se rend compte du décalage entre l’URSS des médias occidentaux et la réalité.

Mamadi Camara est nommé à la Banque centrale après un bref passage à la Banque nationale de développement agricole. Treize années à la BCRG, M. Camara gravit tous les échelons : 1972-1974, Directeur de l’émission et du crédit ; 1975-1981, successivement Directeur du centre de formation bancaire, chef de cabinet, conseiller spécial du Gouverneur. Toutes fonctions qui auront permis à M. Camara de parcourir le monde et de cerner le système bancaire international.

Après « le coup d’État de Diarra Traoré », il est arrêté et emprisonné tour à tour au PM 3, aux 32 Escaliers du camp Alpha Yaya et au pénitencier de Kindia, de 1985 à 1988. Ayant lu le livre d’Alsény René Gomez « Camp Boiro, parler ou périr », Mamadi Camara note que les atrocités du Camp Boiro selon M. Gomez n’ont rien à voir avec les réalités de l’histoire récente de la Guinée, tout comme le slogan « Plus jamais ça ». L’auteur se demande comment Alsény René Gomez peut être oublieux des événements des 4 et 5 juillet 1985.

Mamadi Camara réfute les « déclarations sensationnelles d’Amnesty International relayées par certaines personnes dont des Guinéens selon lesquelles le régime du PDG aurait tué 50 000 prisonniers au camp Boiro. Sans en fournir aucun élément de preuve matérielle. » Il dénonce la comparaison faite entre le Camp Boiro et les camps de concentration nazis.

Après ce chapitre tragique, celui glorieux de la tradition mandingue, chevillée au corps du grand commis de l’État qu’il fut. L’ouvrage fourmille de détails, anecdotes, métaphores, des sentences dues à sa mère. De messages livrés en maninka par lui traduits avec maestria en français. Tel dit sa mère : « La vie d’un couple est emmaillée d’altercations et d’intimités ». Camara renvoie le lecteur à la citation de l’auteur américain Gary Busey : « Le mariage est la seule guerre où on dort avec l’ennemi ».

Sur le plan politique, Mamadi Camara raconte comment, en 1992, alors qu’il résidait à New York, Mansour Kaba, Directeur général de la société Trans African services, dont le siège est à Abidjan, lui propose un poste dans sa société. Estimant qu’Abidjan est plus près de la Guinée où se trouve sa mère, à laquelle il est fortement attaché, il accepte la proposition de M. Kaba. Tout se passe bien jusqu’au jour où son patron lui apprend qu’il a créé un parti politique dénommé Dyama. Et qu’il souhaite que ce talent rejoigne son parti. « Sans biaiser, il répond qu’avant même d’arriver en Côte d’Ivoire, qu’il avait adhéré au RPG d’Alpha Condé ». Sans savoir qu’avec cette réponse, il venait de signer son licenciement à la TAS. Le 10 octobre 1993, le Directeur administratif de la société lui annonce la fin de son contrat.

Mamadi Camara a suffisamment de l’expérience qui le met à l’abri du chômage. L’économiste chevronné est tantôt consultant, tantôt employé à la Banque africaine de développement. Avec l’avènement du RPG au pouvoir, l’homme sera nommé ambassadeur de la Guinée en Afrique Australe avec résidence en Afrique du sud. Mamadi Camara raconte l’anecdote : le 6 mai 2018, il séjourne à Brazzaville, Alpha Condé lui annonce qu’il le nomme ministre des Finances.

A la lecture de cet ouvrage, on découvre un homme de culture avec grand C. Il est rare de voir une personne ayant des connaissances très approfondies dans des domaines aussi divers et variés que la politique, l’économie, la musique, le cinéma et le sport. Or, ici, le lecteur est impressionné lors qu’il s’agit du 7ème art. Tout comme la musique. En ce qui concerne le Sport, il n’a rien à envier à un spécialiste. Racontant avec détails les performances des footballeurs, boxeurs ou encore tennisman.

Habib Yembering Diallo