Freetown a rappelé jeudi 16 janvier son ambassadeur à Conakry après la saisie, par les autorités guinéennes, de sept valises suspectées de contenir de la cocaïne dans un véhicule diplomatique de l’ambassade sierra-léonaise. Une enquête a été ouverte, mais à ce stade, aucune preuve n’implique directement l’ambassadeur dans ce trafic.

Almamy Bangura, l’ambassadeur, et Albert Josiah Coker, le chef de la chancellerie, ont été rappelés à Freetown pour fournir des explications sur les circonstances ayant permis un tel incident.

C’est une première. Certes, d’autres saisies de drogue ont déjà eu lieu dans cette région, comme le rappelle l’Office des Nations unies contre la drogue et le crime, mais jamais à un tel niveau diplomatique.

L’itinéraire, le rôle des personnes impliquées, les failles sécuritaires…

L’enquête, menée avec les autorités guinéennes, devra répondre à plusieurs questions.

D’abord, l’itinéraire. On sait que le véhicule incriminé a commencé son trajet en Sierra Leone avec un laissez-passer pour la Guinée avant d’être intercepté le 31 décembre. 

Ensuite, le rôle des personnes impliquées. Deux individus sont en cause : le chauffeur et un autre occupant dont l’identité reste à ce jour inconnue. 

Enfin, les failles sécuritaires. Comment un véhicule diplomatique a-t-il pu transporter jusqu’à 13 kilos de drogue et 2 000 dollars en espèces sans éveiller de soupçons ? Une question à laquelle les enquêteurs s’efforceront de répondre.

Sur le plan diplomatique, la Sierra Leone minimise les tensions avec Conakry et prône la collaboration. Mais Freetown, visiblement embarrassée, promet des sanctions exemplaires, quel que soit le statut des responsables. 

Pour l’heure, aucune preuve ne met directement en cause l’ambassadeur, qui n’était pas à bord du véhicule lors de sa saisie le 31 décembre dernier. Cependant, lui et le responsable administratif de la mission devront expliquer pourquoi ce véhicule, muni de plaques diplomatiques, avait reçu un mandat officiel de l’ambassade.

« Les relations diplomatiques avec notre pays frère, la Guinée, se poursuivent… »

Cette affaire, embarrassante pour Freetown, ne devrait toutefois pas compromettre les relations avec la Guinée, selon le ministre de l’Information, Chernor Bah : « Les relations diplomatiques avec notre pays frère, la Guinée, se poursuivent. Nous discutons quotidiennement de cette affaire, en essayant d’obtenir tous les faits, tout comme eux, pour comprendre les causes, l’itinéraire et les personnes impliquées dans ce réseau. Ce qui est clair, c’est l’engagement du gouvernement sierra-léonais contre le trafic de drogues illicites. Nous tiendrons les responsables pour compte, et quiconque est impliqué fera face à la pleine rigueur de la loi, quel que soit son statut ou sa position. »

Depuis 2019, l’Afrique de l’Ouest est devenue une zone clé du trafic de drogue, avec plus de 126 tonnes de cocaïne saisies dans la région, selon l’Office des Nations unies contre la drogue et le crime. 

Cette affaire est cependant unique en raison de son envergure diplomatique.

En avril dernier, le président Julius Maada Bio avait déjà tiré la sonnette d’alarme, déclarant la consommation de drogues comme une « urgence nationale ». 

Par RFI