Le 24 février, à l’occasion du troisième anniversaire de l’invasion de l’Ukraine par la Russie, la Délégation de l’Union européenne en Guinée a animé une conférence de presse à son siège à Coléah, dans la commune de Matam. Les responsables de lUE ont rappelé la gravité de cette guerre et ses répercussions dans le monde.

Cette commémoration a été présidée par l’ambassadrice de la délégation de l’Union européenne en Guinée, Jolita Pons. Elle a parlé d’un triste anniversaire qu’on aurait tous souhaité ne pas célébrer. Elle tacle la Russie de Vladimir Poutine et insiste sur le fait que les choses doivent être appelées par leur nom : « Ce n’est pas une opération spéciale, rien de tout cela. C’est une guerre menée contre un pays souverain qui menace son intégrité territoriale. Donc soyons clair, qui est l’agresseur et qui est la victime ? »

L’arrivée de Donald Trump à la Maison blanche risque de bouleverser l’ordre mondial. Le milliardaire et président américain se rapproche de la Russie et qualifie le président ukrainien de dictateur sans élections. Il n’exclut pas de signer un accord de paix sur l’Ukraine, sans l’Ukraine. Cela inquiète Jolita Pons : « Le respect de la souveraineté et de l’intégrité territoriale doivent être des piliers fondamentaux de l’ordre international. Ce point est très important pour l’Union Européenne, pour l’Ukraine mais aussi pour tout le monde, parce que le respect de la souveraineté et l’intégrité territoriale sont à la base l’ordre international ». Selon elle, une paix durable ne peut être envisagée sans l’UE : « Le besoin urgent d’arriver à une paix durable et juste pour finir cette guerre est plus que nécessaire. Pourquoi ? Parce que pour le peuple qui subit la guerre depuis 3 ans avec la perte des vies humaines, et la démolition de ces villes… Mais c’est aussi une urgence pour l’Union Européenne qui se sent menacée dans sa sécurité. On s’en souvient, on en parle moins maintenant, mais c’est toujours d’actualité. Cette guerre a comme effet et impacte la sécurité globale du monde, la sécurité de l’énergie et la sécurité alimentaire. Ce qui impacte d’ailleurs beaucoup plus les pays pauvres et sous-développés partout dans le monde et les populations les plus vulnérables, y compris celle de la Guinée ».

Les autorités américaines menacent de retirer leur aide à l’Ukraine si celle-là ne les laissent pas exploiter une partie de leurs ressources minières rares. A en croire Jolita Pons, l’Union européenne reste le plus grand donateur à l’Ukraine, avec un soutien de « 135 milliards d’euros, dont près de 49 milliards d’aide militaire. Il y a aussi d’autres formes de soutien… Les nombreuses sanctions qui ont été imposées à la Russie et l’on vient d’apporter le sixième paquet de sanctions. Nous contribuons à cette lutte contre l’agression. Sans oublier que l’Union européenne a accueilli plus de 4 millions de réfugiés ukrainiens, placés sous protection temporaire et qui, aujourd’hui, travaillent avec l’UE en espérant retourner un jour dans leur pays. Nous serons avec l’Ukraine jusqu’à ce qu’une paix durable revienne », a-t-elle promis.

Pour sa part, l’ambassadeur de la France en Guinée, Luc Briard, estime que ce conflit n’est pas un conflit européen, c’est une guerre pour le droit international et pour l’intégrité territoriale des Etats. « Un pays comme la Guinée, qui a, en 1958, dit sa souveraineté, c’est quelque chose qui marque. Il ne faut pas se tromper. La lutte doit être menée par tout le monde si on veut sortir de cette crise qui n’a que trop durée. L’Ukraine est le grenier du monde. On l’a vu avec la flambée des prix du blé et des engrais. Derrière ce conflit, c’est la stabilité alimentaire des populations guinéennes qui est en jeu. Un pays comme la Guinée, qui a proclamé sa souveraineté en 1958, ne peut rester indifférent à une guerre qui bafoue le droit international. C’est une question de principe et de solidarité universelle », a estimé le diplomate français.

Une guerre qui remet en cause l’équilibre mondial

Charles Amara Sossouadouno, consul honoraire de l’Ukraine en Guinée, estime que cette guerre remet en cause l’équilibre mondial : « L’exploitation des ressources naturelles et les alliances stratégiques deviennent un instrument de marchandage et d’échange d’une protection militaire ou d’un soutien diplomatique. Cette nouvelle forme de domination menace l’ordre international fondé sur le droit, la justice, la sécurité et la coopération internationale ». Il rappelle que l’Ukraine ne lutte pas seulement pour son existence, « elle défend également les valeurs universelles en garantissant la sécurité et la stabilité du monde entier ».

Rappelons que début février, indique un confrère, le président ukrainien évoquait 46 000 soldats tués et 380 000 blessés depuis le 24 février 2022. Des dizaines de milliers de civils seraient morts, assurait-il au début du mois. Côté russe, fin 2024, l’ex-secrétaire américain à la Défense, Lloyd Austin, avait estimé que 700 000 militaires russes avaient été tués ou blessés.

Kadiatou Diallo