Il y a exactement 50 ans, le 28 mai 1975, quinze pays ouest-africains s’accordent pour établir la Cédéao, la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest. Il aura fallu pas loin de dix ans pour concrétiser l’idée d’union économique, d’abord portée à l’origine par le président du Liberia, William Tubman. Puis c’est bien grâce à la détermination du Nigérian Yakubu Gowon et du Togolais Gnassingbé Eyadéma que ces quinze États signent le Traité de Lagos. Retour sur le contexte de création de l’organisation.

Le général Yakubu Gowon savoure l’instant, ce 28 mai 1975 à Lagos. Le président Léopold Sédar Senghor a délégué son Premier ministre Abdou Diouf. Mais l’Ivoirien Félix Houphouët-Boigny et neuf autres chefs d’État écoutent religieusement le discours de leur pair nigérian habillé en uniforme militaire d’apparat. Yakubu Gowon : « C’est un jour mémorable, le résultat d’un effort persistant de la part des dirigeants de tous les coins de l’Afrique de l’Ouest. Un autre pas important et concret pour donner des effets pratiques aux aspirations que nous nous sommes tous efforcés depuis le début de la dernière décennie d’amener à la fusion. »

De 1972 à 1975, le président nigérian et son homologue togolais, Gnassingbé Eyadéma défendaient lors d’une tournée ouest-africaine le concept de l’intégration régionale. Yaouza Ouro Sama est l’actuel greffier en chef à la cour de justice de la Cédéao. Pour lui, le Traité de Lagos a servi de colonne vertébrale à des nations dont l’indépendance était récente à l’époque. Youaza Ouro Sama : « Il y avait des États qui étaient en guerre, qui s’entredéchiraient. Il n’y avait aucun cadre dans lequel ils pouvaient discuter ou dialoguer pour mettre les choses en commun. On avait des économies fragmentées, des pays qui étaient non structurés. »

La libre circulation des personnes devient l’un des acquis majeurs dès le démarrage de la Cédéao. Pourtant, jusqu’aux années 1990, traverser une frontière terrestre avec une pièce d’identité est loin d’être un réflexe pour des millions de Ouest-Africains. M. Tony Luka Elumelu est un ancien officier d’immigration : « La plupart des gens ne se déplaçaient pas avec un passeport. Ils se déplaçaient avec un document officiel. Comme au Nigeria et au Niger, à la frontière, il s’agissait simplement d’une autorisation fiscale délivrée par l’un ou l’autre pays. Et c’est ce que les gens utilisaient à l’époque pour traverser la frontière. »

Cinquante ans après le Traité de Lagos, la Cédéao vit à l’ère numérique. Et son seul fondateur encore vivant, Yakubu Gowon, possède un passeport vert biométrique. Comme des millions de citoyens ouest-africains.

Par RFI