Le scandale autour de l’organisation du Hadj 2025 continue de prendre de l’ampleur : 416 fidèles musulmans ont déposé plainte ce mardi 27 mai à la Direction centrale de la police judiciaire (DCPJ), pour escroquerie contre une femme se faisant passer pour une proche de la famille présidentielle.

Au cœur de l’affaire, une agence de voyage fictive dirigée par une femme qui prétend être l’amie intime de la mère du Président Mamadi Doumbouya, pour donner du crédit à ses activités frauduleuses. La mise en cause Domani Konaté, alias Nani, aurait distribué des documents aux candidats au pèlerinage émanant d’une agence fictive soit-disant dirigée par la maman du Président Mamadi Doumbouya.

Les victimes affirment avoir versé des sommes comprises entre 50 et 75 millions de francs guinéens, par candidat, directement sur le compte personnel de Nani Konaté. Le montant total est estimé à plus de 27 milliards de francs guinéens.

Une imposture bien orchestrée

D’après Amara Sylla, fonctionnaire au ministère de l’Environnement et président du collectif des victimes, le stratagème s’est appuyé sur des éléments crédibles : « La formation s’est tenue à la mosquée Fossidet, l’une des dix mosquées retenues par la Ligue islamique de Guinée. Hadja Domani Konaté distribuait des fiches au nom d’une agence fictive et recevait des paiements en espèces ou par virement sur son compte personnel. Même certaines agences agréées ont été mêlées, parfois à leur insu. »

Les victimes ont été vaccinées et ont reçu l’uniforme officiel, habituellement fournis par la Ligue islamique, renforçant ainsi l’illusion d’une procédure légitime. Elles se voyaient déjà aux lieux saints de l’islam, enturbannées.

Face à l’ampleur de l’escroquerie, une plainte a été déposée contre Domani Konaté, introuvable. Toutefois, trois de ses complices présumés ont été arrêtés, et plusieurs comptes bancaires liés à l’affaire saisis sur ordre du Parquet du tribunal de première instance de Mafanco. L’une des agences impliquées aurait inscrit 58 personnes. Dès que son responsable a compris la supercherie, il s’est présenté à la DCPJ, facilitant ainsi les premières démarches judiciaires.

Une fraude de grande ampleur

Au nom des victimes, Amara Sylla lance un appel aux autorités : « Nous sollicitons l’intervention du Président de la République et du gouvernement. Nous avons versé ces sommes non pas pour être floués, mais pour accomplir un acte religieux. À ce jour, aucune autorité religieuse ne nous a encore reçus. » Néanmoins, le collectif garde une lueur d’espoir: « Nos passeports sont encore à la DCPJ, ce qui laisse penser qu’un départ reste envisageable, si Dieu le veut. Mais pour l’instant, rien n’est certain. Nous avons été trahis, malgré les assurances des grands guides religieux présents à la mosquée Fossidet.»

Les victimes affirment n’avoir été mises au courant de l’arnaque qu’après la disparition de Domani Konaté. Le dernier « choc » est survenu lorsque des informations confuses ont été transmises par un membre du réseau, révélant ainsi l’ampleur de la fraude. Cette affaire met en lumière un réseau structuré, capable d’instrumentaliser des symboles religieux et institutionnels (uniformes, vaccins, encadrement…) pour tromper des centaines de fidèles. À quelques jours des derniers départs pour le pèlerinage, les victimes réclament justice, réparation et surtout une réaction rapide de l’État pour sauver ce qui peut l’être.

Abdoulaye Bah