Le 12 mai à Abidjan, le Premier ministre Amadou Oury Bah a annoncé que les Guinéens voteront pour l’élection présidentielle et celles législatives en décembre prochain. Reste à savoir si son annonce du reste inédite, faite après la fixation de la date du référendum constitutionnel au 21 septembre prochain, sera validée par un décret du président de la transition, le Général Mamadi Doumbouya.
Le 31 décembre 2024, dans ses vœux de nouvel an à ses compatriotes, Mamadi Doumbouya avait déclaré que 2025 sera « une année électorale », pour le retour à l’ordre constitutionnel. A peine le premier trimestre 2025 bouclé, le 1er avril, il a fixé la date du référendum constitutionnel au 21 septembre 2025. Comme il l’avait promis. Hormis la floraison des mouvements de soutien à sa candidature, des véritables campagnes avant l’heure et le recensement électoral biométrique démarré la mi-avril, les signes d’un processus de retour à l’ordre constitutionnel se faisaient attendre.
Pendant que les Guinéens s’empressent à se faire recenser, tout en se demandant quand vont-ils élire leur nouveau président, le PM Bah Oury lève l’équivoque. Dans des propos brefs, Bah Oury a déclaré que le « 21 septembre 2025, le référendum constitutionnel sera organisé. Décembre 2025, à la fois l’élection présidentielle et l’élection législative. » Une déclaration faite en marge de l’Africa CEO Forum (ACF),un rendez-vous annuelorganisé par Jeune Afrique Media Group et qui a réuni des investisseurs à Abidjan, en Côte D’Ivoire, le 12 et le 13 mai. Précisément, dans son discours de clôture d’une session intitulée Investir en Guinée.

Bah Oury et Ousmane Gaoual sur la même longueur d’ondes ?
L’agenda électoral dévoilé par le Premier ministre semble corroborer les propos du ministre des Transports, Ousmane Gaoual Diallo. Lors de son récent séjour parisien, le porte-parole du gouvernement confiait à nos confrères de Jeune Afrique, le 23 avril, que les autorités étaient en train d’étudier la possibilité de coupler certains scrutins. Un revirement d’autant qu’auparavant, la tenue séparée du référendum constitutionnel, des élections communales et communautaires, législatives et finalement la présidentielle était l’option privilégiée. «Le retour à l’ordre constitutionnel ne signifie pas systématiquement l’organisation d’une élection présidentielle, ni de scrutins législatifs, a soutenu Ousmane Gaoual. Il s’agit de doter le pays d’une nouvelle Constitution. C’est la charte de la transition qui fait office de loi fondamentale aujourd’hui. La Guinée aura opéré son retour à l’ordre constitutionnel lorsque les citoyens auront approuvé le texte soumis au référendum. Toutefois, pour parachever ce retour, il faut aussi mettre en place d’autres institutions, comme la présidence de la République. Actuellement, nous examinons la possibilité de coupler la présidentielle aux législatives pour le dernier trimestre 2025.» L’annonce du Premier ministre semble ainsi abonder dans le même sens. Une fois n’est pas coutume, serait-on tenté d’affirmer.
Un chemin parsemé d’embuches
Si les scrutins présidentiel et législatifs se tiennent en décembre, les Guinéens mettront ainsi fin à une transition qui a cours depuis après le coup d’État contre Alpha Condé, le 5 septembre 2021. Non sans avoir surmonté assez d’obstacles. Dans une interview à JA en mars dernier, Bah Oury lui-même les avait évoqués, mentionnant notamment le recensement électoral. « La méthodologie qui consistait à réaliser le PN-Ravec [Programme national du recensement administratif à vocation d’état-civil] jusqu’au bout et à extraire le fichier électoral s’est avérée inopérante. D’où des nouveaux mécanismes et un changement de système pour que, parallèlement, on procède au recensement électoral », avait-il indiqué.
Plus d’un mois après, le recensement est bien en cours à travers la Guinée, reste à savoir si le fichier électoral qui en sera extrait sera disponible à temps. Les futures élections seront-elles inclusives, crédibles et transparentes ? Une autre paire de manche pour le gouvernement. Puisque le 13 mars dernier, dans son élan de « purification et de restructuration du paysage politique guinéen », le gouvernement, via le ministère de l’Administration du territoire et de la décentralisation, a suspendu 24 partis politiques. Parmi eux, l’Union des forces républicaines (UFR) de Sidya Touré et le Rassemblement du peuple de Guinée, RPG arc-en-ciel de l’ancien président Alpha Condé. Il leur était demandé, entre autres, la tenue de congrès réguliers.
Les Guinéens attendent aussi de Mamadi Doumbouya de se prononcer sur sa candidature ou non à la prochaine présidentielle. Les campagnes de son soutien, elles, se multiplient. Pour nombre d’observateurs, la candidature du président de la transition est un secret de Polichinelle, alors qu’il avait prêté serment de ne compétir à une quelconque élection marquant le retour à l’ordre constitutionnel.
Mamadou Siré Diallo