Depuis les premières pluies, Conakry est bourrée d’ordures, particulièrement de déchets plastiques. Le 15 mai, dans la commune de Matam, la Gouverneure de la capitale, M’Mahawa Sylla, a lancé officiellement un projet visant à inciter la population à participer activement à l’assainissement. Il s’agit d’échanger les déchets plastiques contre la denrée de première nécessité en Guinée, le riz.
L’opération « riz contre déchets plastiques » se déroulera le 15 de chaque mois et touche les 13 communes de Conakry. Le projet repose sur un système d’équivalence entre la quantité de déchets plastiques apportés et la quantité de riz offerte. Selon le communiqué, l’échange s’opérera de la façon suivante : un sac de 8 kg de sachets plastiques contre 5 kg de riz ; 5 kg de bouteilles en plastique contre 5 kg de riz ; 30 kg de chaises en plastique contre 5 kg de riz et 10 kg de bidons en plastique contre 5 kg de riz.
Le 16 mai, Souleymane Bah, chargé de la communication au Gouvernorat de la ville de Conakry, basé dans la commune du Kaloum, est revenu sur les motivations. Selon lui, la nuisance des déchets plastiques est un phénomène connu de tous. « Partout où vous passez, ce sont les déchets plastiques. Que ça soit sur les routes ou dans les caniveaux, tout est bourré. Et même après le curage des caniveaux, vous trouverez 90% des déchets sont plastiques. Cela occasionne beaucoup de dégâts et nous savons tous que ce n’est pas biodégradable. Dans les conditions normales, quand les déchets plastiques sont jetés, il faut au minimum 100 ans, pour qu’ils se dégradent, et même en 100 ans, ils ne se dégradent pas complètement. C’est donc la raison pour laquelle, nous nous sommes dit d’initier quelque chose de nouveau, parce qu’on a tout fait à travers les assainissements et les sensibilisations, mais nous trouvons toujours qu’il n’y a pas pratiquement aucune amélioration. Quand les gens boivent de l’eau, ils jettent les sachets à terre, au lieu de les mettre dans une poubelle. Même les passagers dans des voitures jettent les sachets utilisés par la fenêtre. C’est pourquoi, nous nous sommes dit qu’il faut changer de stratégie. C’est là que l’opération « Riz contre sachets plastiques » est venue ».
A la question de savoir, si ces déchets seront recyclés, M. Bah répond : « Effectivement, ces déchets seront recyclés pour des fins utiles. Il y a des sociétés dont j’ignore le nom pour le moment, mais dès après le lancement de l’opération à Matam, le ramassage a démarré. Dans les différentes communes, là où nous avons travaillé, on a regroupé les déchets et des camions sont venus tout collecter pour envoyer. Pour le moment, la collecte se fait au niveau des communes. Et dans toutes les autres communes, les camions sont passés pour prendre ce qui a été collecté le premier jour », renchérit M. Bah.
Il termine ses propos par exhorter la population à plus de responsabilité : « La seule chose que je souhaite, que chaque citoyen soit conscient du danger de ces plastiques, de les ramasser au lieu de les jeter, de les prendre et les mettre dans les poubelles. Que chaque habitant accepte de s’abonner aux PME, pour résoudre une bonne fois le problème d’ordures ».
Chez des PME (Petites et moyennes entreprises), Mansaré Mohamed, responsable d’une PME dans la commune de Gbessia, se dit soulagé par la mesure. « Parce que désormais, dit-il, les déchets plastiques que nous collecterons nous les enverrons vers la commune, seuls les autres déchets iront à la poubelle. D’ailleurs, c’est ce qui est meilleur pour notre environnement. Cette opération est murement réfléchie. Nous sommes plus que ravis. Nous collectons les ordures dans toute la commune, je vous assure que les déchets plastiques sont plus nombreux que les autres ordures ».
Des citoyens réagissent
M’Mah Soumah, citoyenne de Kaloum, salut l’initiative. « Nous félicitons et encourageons madame la gouverneure qui veut rendre notre capitale propre. Echanger les déchets plastiques contre du riz a plu plus d’un. Non seulement les quartiers seront propres, mais nous qui peinons à avoir de quoi nourrir nos enfants, sommes plus que soulagés. On ne peut qu’encourager et soutenir madame la gouverneure ».

Même son de cloche chez cet autre vendeur de café ambulant. « Cette opération ne peut que réjouir le Guinéen qui ne connait que le riz comme aliment de base. Nous savons tous comment le Guinéen se grouille, pour avoir de quoi mettre dans la marmite. Chaque matin, si tu es sûr de partir avec un sac de plastique, pour rentrer à la maison avec du riz pour ta famille, franchement, on ne peut que remercier madame la Gouverneure pour cette initiative. En tant que marchand ambulant, désormais tout sachet plastique que je vois dans la rue, je ramasse pour collecter, afin de ramener du riz pour ma famille…»
Kadiatou Diallo